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postulantes est mise à de rudes épreuves. On exige qu’elles sachent à quoi s’en tenir sur les articles de foi d’Athanase en ce qui touche l’incarnation, sur les martyres de saint Ignace et de saint Polycarpe, sur le premier et le quatrième concile, enfin sur les docteurs auxquels on doit la préparation des trente-neuf articles et la révision du livre de prières sous les règnes d’Édouard VI et d’Elisabeth. Des théologiens ne seraient pas pressés plus vivement ni sur de plus graves matières. En histoire et en géographie, le programme n’est pas moins exigeant : le règne d’Alfred, la conquête normande et ses suites, Cromwell et les Stuarts, les rois et les reines sont la part de l’histoire, à laquelle s’ajoute la liste des principaux noms engagés dans l’indépendance américaine. La part de la géographie est tellement large qu’après une vue générale du globe, de ses fleuves, de ses chaînes, de ses divisions naturelles ou politiques, on en vient à des problèmes qui partagent les savans : les causes des marées, l’influence qu’exercent sur le climat la distance de la mer, les vents régnans et la nature du sol ; enfin, ce qui est plus délicat encore, la désignation de celle des colonies anglaises qui est la plus profitable au commerce de la métropole avec des preuves à l’appui.

Comment supposer que de semblables questions puissent aboutir à autre chose qu’à des réponses purement machinales ? Des filles de quinze ans, si ouverte que soit leur intelligence, ne sauraient voir plus clair dans ces broussailles de l’érudition que les casuistes et les lettrés, qui, depuis un temps immémorial, se disputent sur les textes et sur les gloses. Quand on aura fait répéter à ces écolières l’épître aux Galatiens ou aux Philippiens sans qu’elles bronchent d’une syllabe, quand elles auront raconté ce qui se rattache à Séchem, à Shalem, à Beerlahai-Roi, comme le veut la table des examens, qu’y aura-t-il à en conclure, si ce n’est que la mémoire est bonne et la leçon bien apprise ? Point de tâtonnement sur la lettre ; seulement le sens et l’esprit échappent. Il y a là un vice d’origine qui, introduit dans l’enseignement, ne l’abandonne plus. Une leçon machinalement apprise est toujours une leçon machinalement enseignée. Beaucoup d’inspecteurs s’en plaignent en termes assez vifs. Rarement une explication vient éclairer le sujet ; tout se réduit au formulaire. L’un de ces inspecteurs visitait une école : à peine y était-il entré que l’instituteur, pour faire valoir ses élèves, leur posa une question. « Quel passage dans les Écritures commande le devoir