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ARISTOPHANE.

Oh ! alors, je vais bien les faire rire, ces nouveaux Athéniens !

MERCURE.

Détrompe-toi, ils t’ont dépassé de beaucoup, et ne te demanderont que ta sagesse, qui est de tous les temps.

ARISTOPHANE.

En quel temps sommes-nous donc, selon toi ?

MERCURE.

À plus de vingt-deux siècles du jour où tu crois vivre.

ARISTOPHANE.

Est-ce à dire que la postérité conserve la fraîcheur de ma gloire ?

MERCURE.

Non pas sans restriction, mais autant que tu le mérites.

ARISTOPHANE.

Et que venons-nous faire en ce lieu, qui a quelque ressemblance avec un théâtre ?

MERCURE.

Tu vas assister à ta représentation de quelques parties de ta dernière pièce.

ARISTOPHANE.

De mon Plulus ? Toutes mes pièces ne sont-elles pas excellentes d’un bout à l’autre ?

MERCURE.

Je suis trop poli pour te contredire ; mais la liberté de ton langage et de tes tableaux ne serait pas soufferte ici.

ARISTOPHANE.

Les hommes sont donc devenus vertueux ?

MERCURE.

Oui, relativement aux mœurs antiques.

ARISTOPHANE.

Grâce à mes satires, je le parie !

MERCURE.

Tes satires y ont contribué.

ARISTOPHANE.

Mais si l’on a fait des changemens dans ma pièce, on a donc mis quelque autre fiction à la place ?

MERCURE.

Une courte fiction amoureuse des plus simples.

ARISTOPHANE.

Je m’oppose à cela. L’amour n’est pas du ressort de la comédie !

MERCURE.

La comédie ne peut plus s’en passer.

ARISTOPHANE.

Allons ! rien ne doit étonner le sage ; mais quel audacieux s’est permis ?…