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dans une hauteur d’eau telle que l’on ne pouvait songer à repêcher l’extrémité. On revint alors à Cagliari pour commencer le relèvement par l’autre bout; mais une rupture se produisit encore à une petite distance de la côte. M. Brett recommença l’opération pendant la campagne suivante avec un câble plus léger. Une erreur de route en compromit encore le succès : le câble était épuisé avant qu’on eût touché terre; on avait franchi toutes les grandes profondeurs probablement avec une perte considérable de fil, et le bâtiment porteur se vit obligé de stationner en pleine mer, avec l’extrémité libre attachée à son arrière, en attendant que le complément fût arrivé. Pendant ce temps, un grain survint, et le câble se rompit encore.

Enfin en 1857 MM. Newall et C° fabricans de câbles, se chargèrent de l’opération à leurs risques et périls pour le compte des concessionnaires, et réussirent à immerger un câble à quatre conducteurs, dont deux seulement se trouvèrent bons; le troisième avait un défaut grave, et le quatrième était tout à fait mauvais. Après quelques accidens et quelques réparations partielles, les quatre fils furent complètement hors de service en 1860. Les ingénieurs de la compagnie voulurent le relever pour le réparer; à partir de chaque extrémité, on put en retirer 30 ou 40 kilomètres jusqu’à une profondeur de 2,800 mètres environ, puis il se brisa, et l’opération fut abandonnée. Ici comme dans toute occasion analogue, les parties relevées montraient une altération de l’enveloppe métallique, la garniture de chanvre était pourrie aux endroits où elle avait été en contact avec l’eau; la gutta-percha était intacte, sauf quelques rainures longitudinales tracées à la surface par des insectes. De la vase, des minerais, étaient attachés aux fils de fer; quelques coquilles d’huîtres étaient même moulées sur l’enveloppe et paraissaient s’y être développées.

Pour suivre l’ordre chronologique, nous devons revenir en arrière, à l’année 1855. Afin d’assurer les communications télégraphiques entre la Crimée et la Turquie, le gouvernement anglais fit immerger dans la Mer-Noire un câble de Varna à Balaclava sur une longueur de 570 kilomètres. C’était simplement un fil de cuivre recouvert de gutta-percha et d’un diamètre total de 7 à 8 millimètres. Près des côtes, ce fil était protégé par une enveloppe métallique. On croit que la profondeur d’eau était peu considérable. Ce câble si simple eut juste la durée qu’on lui demandait, car il se rompit peu de temps après la conclusion de la paix. Ce fut la première ligne télégraphique sous-marine à grande distance, et l’on y constata le retard des courans, phénomène déjà connu, mais que les électriciens n’avaient pas eu l’occasion d’observer aussi complètement, et dont ils soupçonnaient à peine l’immense influence sur les transmissions