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pris pied sur le sol africain, une des premières qui y aient amené des capitaux et donné des bénéfices réels. Sur les 1,800,000 hectares de forêts que renferme l’Algérie, on a déjà reconnu plus de 200,000 hectares de forêts de chênes-lièges, et les concessions accordées s’étendent sur plus de la moitié de celles-ci ; mais le liège ne restera pas toujours le seul produit de ces forêts, et un jour viendra où l’on pourra utiliser une foule d’essences précieuses qu’elles renferment, et que le défaut de routes et le haut prix de la main-d’œuvre ont seuls empêché d’exploiter jusqu’ici. Telles sont le chêne zéen, le chêne à glands doux, le pin d’Alep, le cèdre, le thuya, l’olivier, etc. On a pu juger de la variété de ces espèces et de l’avenir qui leur est réservé par l’exposition que M. Lambert, inspecteur des forêts à Bone, a envoyée à Londres, et qui se composait de 104 échantillons de divers bois, d’une collection de lièges, d’un herbier en cinq volumes, renfermant les fleurs, feuilles, bois et fruits des 215 végétaux ligneux reconnus jusqu’aujourd’hui en Algérie, avec leurs noms vulgaires et botaniques, enfin d’un traité sur l’exploitation des forêts de chênes-lièges.

L’administration des colonies françaises avait également exposé une très belle collection de bois, dont il était malheureusement impossible, faute de renseignemens à l’appui, d’apprécier toute la valeur. Tout au moins pouvait-on constater la beauté des échantillons, la richesse des nuances, et se convaincre que beaucoup d’entre eux sont des bois d’ébénisterie de premier choix. On ne peut du reste que louer l’administration française de ses efforts pour faire connaître les ressources variées qu’offrent nos colonies. Cependant il est quelque chose qui plus que toutes les expositions du monde contribuerait à leur prospérité : ce serait d’avoir toujours présent à l’esprit ce précepte de Montesquieu, que « les pays sont cultivés non en raison de leur fertilité, mais en raison de leur liberté. » Nous allons trouver une remarquable confirmation de ce fait en passant en revue l’exposition ligneuse des principales colonies anglaises, qui sous ce rapport représentaient à elles seules toutes les parties du monde.


II.

Il n’est pas besoin d’un examen bien approfondi pour reconnaître qu’à étendue égale l’Amérique possède une beaucoup plus grande variété d’espèces végétales que l’Europe. Suivant les uns, ce fait, qu’un simple coup d’œil suffit à constater, est dû à la direction des chaînes de montagnes qui, s’étendant du nord au sud, offrent plus de variété dans les conditions climatériques, et permettent par con-