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de ces efforts combinés est le Musée-École du Sud de Kensington (South-Kensington Museum), vaste établissement où un grand nombre de jeunes gens des deux sexes viennent se former, par le moyen de bons modèles, dans les arts du dessin, en même temps que des cours bien faits et des collections heureusement disposées les initient, quand ils le veulent, aux sciences appliquées. Cette école ou musée compte de nombreuses succursales dans les villes manufacturières. Je n’entrerai pas dans le détail de cette organisation, je me bornerai à dire qu’elle est très bien conçue, et qu’elle fonctionne admirablement sous l’intelligente direction de sir Henry Cole. M. Mérimée, qui a traité le sujet en maître, fait cette réflexion, que la qualité de l’enseignement des beaux-arts dans un grand état dépend principalement de l’institution qui est placée au faîte, et en conséquence il examine la grande École des Beaux-Arts de Paris, considérée par lui avec raison comme la source première des notions et des méthodes qui se répandent dans le pays au sujet des beaux-arts. Il en signale l’organisation comme laissant beaucoup à désirer, et je dois dire qu’en cela M. Mérimée n’est que l’écho de l’opinion générale. L’École des Beaux-Arts est une institution non pas seulement à modifier dans quelques détails, mais à réédifier de la base au sommet. Faisons des vœux pour que le ministre homme de goût, qui a cet établissement dans ses attributions, attache son nom à une réforme qui imprimerait aux beaux-arts une impulsion salutaire et lui mériterait la reconnaissance de l’industrie.

Encouragemens et développemens à donner à la liberté du travail. — Un des ressorts principaux, ou pour mieux dire le plus efficace élément de la puissance productive de l’homme, qui ne fait qu’un avec le progrès même de l’industrie, c’est la liberté du travail. Les publicistes qui depuis 1789 ont traité des libertés publiques n’ont pas insisté assez sur cette liberté, qui est éminemment féconde et qui touche aux intérêts de chaque jour de la masse de la population. Un des bienfaits de la révolution française a été de rendre libre l’exercice des professions, en ce sens que chacun est maître de choisir celle qui lui plaît, sous un très petit nombre de réserves restrictives. Les règlemens de fabrication proprement dits, qui dataient de Colbert, ont de même été abrogés. Le libre exercice des professions présente pourtant encore des desiderata. Il y a un immense service à rendre à la liberté du travail : c’est de supprimer toutes les entraves résultant de règlemens excessifs qui enchaînent les*facultés de l’homme industrieux. Lorsque, dans sa mémorable lettre du 5 janvier 1860, l’empereur signalait le système ultra-réglementaire qui s’est tant donné carrière en France comme un des abus dont il importait de délivrer l’industrie, il proclamait une vérité que les administrations diverses, centrales et locales, ne sauraient