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Mozart, opéra enchanteur qui a été accueilli par le public avec un véritable enthousiasme. Cet ouvrage délicieux, qu’on n’a pas entendu à Paris depuis quarante ans, est exécuté avec un grand soin par tous les chanteurs qui y prennent part, ainsi que par les chœurs et par l’orchestre, dont le chef, M. Bonetti, a fait preuve en cette circonstance d’un goût délicat. Tout le monde ira applaudir Cosi fan tutte, dont nous parlerons une autre fois avec le respect qu’on doit aux œuvres des hommes divinement inspirés.


P. SCUDO.


LES LIVRES SUR LA CRISE AMERICAINE.

Nombreux sont les ouvrages auxquels la guerre civile des États-Unis a servi de texte ; mais, produits pour la plupart avec une certaine précipitation et déjà devancés par les événemens avant d’être imprimés, ils disparaissent vite pour tomber dans l’oubli. Aujourd’hui la parole est aux canons, et l’on écoute plus volontiers leur tonnerre que la Voix moins bruyante des spectateurs éloignés qui s’érigent en juges de la cause. Tandis que les écrivains cherchent péniblement dans leurs livres à deviner l’histoire, celle-ci s’écrit en lettres de sang sur les champs de bataille, et nulle page humaine ne peut rivaliser en poignant intérêt avec ces pages terribles. Cependant il n’est pas inutile d’examiner en détail les opinions individuelles, afin de se rendre compte des courans divers de l’opinion, et de juger les argumens opposés sur lesquels s’appuient les défenseurs du nord et les avocats du sud. Dans ce déluge de livres et d’opuscules déjà soumis au contrôle des faits, les esprits sérieux ont pu remarquer trois ouvrages écrits à des points de vue divers, et représentant chacun l’un des trois partis qui se disputaient la direction de la république américaine à l’origine de la lutte. Un de ces ouvrages défend la cause du sud et plaide pour la séparation ; un autre, plus timide et plein d’hésitations, finit par proposer un compromis ; le troisième enfin désire le triomphe des abolitionistes et le maintien de l’Union. De ces trois opinions si différentes, il s’agit de savoir laquelle est la plus conforme au droit et la mieux justifiée par les faits dont l’histoire se déroule actuellement.


Le livre de M. James Spence, intitulé l’Union américaine et néanmoins consacré spécialement à la défense des intérêts séparatistes, développe avec une singulière clarté, parfois avec une grande verve, les argumens employés en Angleterre et reproduits en France pour justifier la rébellion des états à esclaves. Son premier mérité est celui de la franchise. Dès la première phrase, il avoue nettement de quel côté le portent ses sympathies, et, ne se piquant point d’une impartialité qui ne lui semble pas possible