Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 42.djvu/319

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quand le corps expéditionnaire fut concentré à Saïgon dans les premiers jours de février 1861.


III

Le jour même où l’amiral commandant l’expédition arrivait à Saïgon, on continua de pousser avec vigueur les préparatifs de la guerre de Cochinchine A Woosung, le corps, expéditionnaire avait été composé, armé, équipé et embarqué ; à Saïgon, il fut mis en état de marcher et de combattre, et ces dispositions définitives qui se rapportent aux lieux et en exigent la connaissance furent assurées et complétées. Les derniers postes furent assignés, les questions personnelles réglées. Le bataillon formé avec le corps des marins débarqués fut placé sous le commandement du capitaine de vaisseau de Lapelin ; il comptait neuf cents hommes, formant neuf compagnies, dont une dite de marins abordeurs, qui devait faire l’office du génie et frayer le passage[1]. L’amiral se consulta avec le colonel espagnol et l’ancien commandant de Saïgon, qui venaient de défendre cette place pendant un an. Il reconnut, avec les commandans du génie et de l’artillerie, la plaine de Ki-hoa, et parcourut la ligne de défense qui avait été tracée, par le contre-amiral Page[2] de l’arroyo de l’Avalanche à la redoute de Caï-maï ; il s’assura que devant cette ligne le terrain était sec, à la rigueur praticable pour l’artillerie malgré les tumulus et les accidens artificiels qui abondent dans cet immense champ des morts. Cet examen le conduisit à penser qu’avec les moyens dont il disposait, et dont l’ensemble faisait le caractère exceptionnel du corps expéditionnaire, il pourrait prendre les Annamites à revers, pendant qu’il les tiendrait sur leur front et sur leur flanc.

En conséquence, il arrêta le plan de campagne suivant, auquel se rangèrent les commandans du génie et de l’artillerie. D’un côté, la flottille, remontant le Don-naï, culbuterait les obstacles accumulés par l’ennemi, détruirait les barrages, réduirait les forts, et dominerait le cours supérieur du fleuve. Venant ensuite et regardant le front et le flanc droit de l’ennemi, la ligne des pagodes, munie d’une puissante artillerie, appuyée sur l’ouvrage neuf et sur une ceinture de navires de guerre mouillés devant Saïgon, maintiendrait l’ennemi dans l’impuissance. Enfin l’armée expéditionnaire, partant de la redoute de Caï-maï, devenue sa base d’opérations, romprait en un premier point les lignes annamites, continuerait sa route hors de

  1. Les marins abordeurs étaient armés de sabres d’abordage et de pistolets-revolvers.
  2. Décembre 1859.