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qui allaient s’ouvrir. L’autre division fut destinée à opérer en Cochinchine. Le vice-amiral, qui prenait la direction de la campagne, désigna le contre-amiral Page pour le suivre et occuper un commandement sous ses ordres. Hong-kong et Canton ressortirent du quartier général de Saïgon.

Le commandant en chef, s’étant rendu à Tien-tsin, s’entendit avec les ambassadeurs et les généraux sur les diverses mesures qui allaient résulter de la situation nouvelle. Le Ditchayla devait être mis à la disposition du baron Gros, qui allait rentrer en France après avoir installé à Pékin M. de Bourboulon, attendu de Shang-haï. Le Ditchayla toucherait à Hong-kong, à Manille, à Saïgon peut-être. Il emportait des renforts[1] pour la garnison de Saïgon, qui se trouvait serrée de plus en plus d’après les dernières nouvelles, et dont le service était des plus rudes à cause de l’étendue des lignes de défense. Le corps de débarquement qui avait marché avec l’armée jusqu’à Pékin était dissous. L’infanterie de marine cessait de faire partie du corps expéditionnaire de Chine ; elle fournirait la garnison de Ta-kou ; le reste serait envoyé à Canton, plus tard à Saïgon. Le général Jamin, le 101e de ligne, le 2e bataillon de chasseurs à pied, une batterie de 12, une batterie de 4, une compagnie du génie et la moitié des services administratifs revenaient à Shang-haï. Le général Collineau était chargé d’occuper Tien-tsin avec le 102e de ligne, deux batteries d’artillerie, une compagnie du génie, quelques cavaliers et la moitié des services administratifs. Le Forbin était mis à la disposition du général Montauban, qui désirait visiter quelques points du Japon avant de retourner à Shang-haï.

Les questions de détail ayant été ainsi réglées entre les chefs d’état-major généraux de la marine et de l’armée, l’embarquement fut commencé malgré les glaces et les tempêtes de l’hivernage. Le vent soufflait presque toujours du large ; la houle arrivait sur les fonds de vase, où elle s’embarbouillait et se changeait en un clapotis plus gênant pour les embarcations qu’un mouvement long et ondulé. Le froid était déjà très vif : les cordes, le pont des navires étaient couverts de verglas ; il gelait souvent le jour ; la nuit, le thermomètre marquait 10, 12 degrés au-dessous de zéro. Les équipages des grandes canonnières venues de Cochinchine, affaiblis par un séjour de deux ans dans un pays chaud, souffrirent cruellement. Vers le 20 novembre, les glaces commencèrent à obstruer le cours du Peï-ho. Dans un violent coup de vent, la canonnière l’Alarme s’échoua sur la barre du fleuve, en face de Ta-kou, perdit son gouvernail et une partie de son étrave. L’aviso l’Alom-Prak eut son hélice hors de

  1. Dépêche du vice-amiral Charner au ministre de la marine, Peï-ho 28 novembre 1860.