Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 41.djvu/869

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pendant ce temps, comme on s’y était attendu, Franklin et Sumner étaient vivement attaqués au White-Oak-Swamp, où les généraux confédérés avaient amené une grande force d’artillerie. Ils se retirèrent pied à pied. Plus tard, dans la journée, Heintzelman était également attaqué aux cross roads. Là, le combat eut lieu dans les bois avec des chances diverses. La division Mac-Call eut beaucoup à souffrir et perdit son chef, fait prisonnier ; mais Hooker et Kearney, venant à son aide, repoussèrent les assaillans en leur faisant éprouver de grandes pertes. Enfin une dernière attaque tentée sur le corps de Porter échoua complètement devant le feu combiné de l’artillerie de campagne et de celle des vaisseaux. La position occupée par Porter, à un endroit appelé par les uns Turkey-Bend, et par les autres Malvern-Hill, était superbe. C’était un plateau élevé, découvert, et qui s’abaissait en pente douce vers les routes par lesquelles l’ennemi pouvait déboucher. La gauche était appuyée à la rivière, sur laquelle se trouvaient le Galena, le Monitor et la flottille des canonnières. L’armée fédérale n’avait donc rien à craindre de ce côté, et par conséquent n’avait à garder qu’un de ses flancs, facile à couvrir avec des ouvrages et des abatis. Le 30 au soir, toutes les divisions étaient réunies dans cette forte position ; le convoi tout entier, le parc de siège, y étaient à l’abri. L’armée enfin s’y trouvait en communication avec les transports et maîtresse de ses approvisionnemens. Le grand et hardi mouvement par lequel elle avait échappé à un grave danger et changé une base d’opérations impossible à garder contre une autre plus sûre était accompli ; mais après un si long effort les troupes étaient exténuées : depuis cinq jours, elles ne cessaient pas de marcher et de combattre. La chaleur avait encore ajouté à l’excès de ses fatigues ; beaucoup d’hommes n’avaient pu y résister : quelques-uns tombaient comme foudroyés par l’ardeur du soleil ; d’autres quittaient les rangs pour se joindre à la grande masse des malades et des blessés qui suivaient l’armée comme ils pouvaient, tant qu’ils pouvaient, et dont la vue offrait un spectacle lamentable. Sans doute il y avait eu, pendant le cours de cette difficile retraite, des momens de trouble et de désordre ; mais quelle est l’armée qui, en pareille circonstance, y pourrait échapper complètement ? Il restait toujours ce fait, qu’assaillie, au milieu d’un pays qui ne lui offrait que des obstacles, par des forces au moins doubles des siennes, l’armée du Potomac avait réussi à gagner une position où elle était hors de péril, et d’où elle aurait pu, si elle avait été suffisamment renforcée, s’il avait été répondu à la concentration des forces ennemies par une concentration semblable, ne pas tarder à reprendre l’offensive.

Comme nous venons de le raconter, chacune de ses parties for-