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=ministère italien de faire à Garibaldi et à ses compagnons un impossible procès. Le général est surtout pressant envers la France, car il est curieux que, tandis que nous portons à Rome des plans de transaction, Turin nous envoie des instances pour une solution radicale, et ne puisse nous envoyer autre chose. Il s’agit donc de répondre au général Durando, et l’on avouera que, dans les circonstances actuelles, il serait impossible, à moins que le gouvernement ne voulût consulter sans retard le pays par des élections générales, que la réponse du cabinet des Tuileries n’exprimât point une opinion décidée sur la marche des affaires italiennes.

Nous ignorons si cette réponse doit être préparée de façon à faire pressentir un système de solution. Dans le cas où le gouvernement serait déterminé à prendre un parti favorable à l’Italie, la marche qu’il aurait à suivre est si bien indiquée par la nature des choses que nous ne sommes pas surpris si le plan suivant est venu à l’esprit de plusieurs personnes. Le gouvernement français déclarerait qu’il veut pratiquer à Rome, comme en Italie, le principe de non-intervention ; mais, avant de retirer ses troupes, il obtiendrait du gouvernement italien l’engagement de s’abstenir, lui aussi, de toute intervention dans les états pontificaux, et d’empêcher l’entrée dans ces états de volontaires enrôlés dans les autres parties de l’Italie. De la sorte le pape et ses sujets se trouveraient seuls en présence. Ce serait au pape d’obtenir l’assentiment de ses peuples ; ce serait aux Romains, si le gouvernement pontifical leur est insupportable, de s’en délivrer et de disposer de leurs destinées. Il va sans dire que, dans tous les cas, des mesures devraient être prises pour la sûreté du pape et du sacré-collège. Ce système équivaudrait, dira-t-on, à laisser faire à Rome une révolution. Nous ne disons pas le contraire, et nous ne comprendrions pas qu’il en fût autrement, puisque depuis treize ans la papauté temporelle ne se soutient que par la présence d’une division française, étendue quelquefois aux proportions d’un corps d’armée ; mais cette révolution aurait été précédée de telles formalités et de telles précautions, elle serait inspirée par les intérêts d’un patriotisme si élevé, elle serait placée sous une surveillance si solennelle, celle de l’univers attentif et ému, elle aurait à rendre d’elle-même des comptes si grands, qu’il n’y aurait pas à craindre qu’elle se compromît et se souillât par des folies et des désordres. Par un tel plan, dira-t-on encore, dont il n’est pas permis de ne point prévoir les conséquences nécessaires, c’est le gouvernement français et la France qui auront marqué la dernière heure du pouvoir temporel des papes et qui auront consenti à voir Rome devenir capitale de l’Italie ; c’est le gouvernement français et la France qui prendront sciemment la responsabilité de ces événemens ! — Nous l’entendons bien ainsi.

Il nous paraît difficile que ces éventualités imposantes ne soient pas l’objet des délibérations de la première réunion du conseil des ministres qui sera présidée par l’empereur. Dans ce conseil, sera-t-il pris un parti, et quel parti ? A la suite de ces délibérations, le ministère sera-t-il modifié, et