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rose à la ceinture de son tablier, une fraîcheur d’innocence répandue surtout le visage, et une pensée douce dans le regard, elle marche gravement entre ces deux aurores, la jeunesse et le matin. L’observation protestante du dimanche a fourni à M. Vautier un autre sujet qui touche de plus près à la vie domestique. Des femmes scandalisées de la conduite de leurs fils ou de leurs maris viennent chercher les buveurs réunis autour d’une table le jour du sabbat et les rappeler au devoir. Le sentiment de la patrie aux prises avec les luttes et les nécessités de la vie, qui exilent souvent les enfans de la vieille Allemagne, se montre sous des traits touchans dans les Emigrans de M. Hübner, rassemblés au cimetière pour dire un dernier adieu aux tombeaux de famille avant de se rendre en Amérique. Deux autres artistes, MM. Otto Weber et Speck, nous intéressent aux épisodes des champs et de la vie des animaux ; des Chevaux libres dans une plaine, effrayés soudain par la musique d’un régiment de crassiers qui passent derrière une haie, et le grand Inconnu, un chien étranger, entouré par tous les chiens du village dans lequel il s’est introduit. Il s’en faut de beaucoup qu’on puisse se faire une idée complète de l’école allemande par les tableaux exposés dans la galerie germanique ; on y constate du moins avec plaisir une nouvelle direction vers l’étude des mœurs domestiques. Sans abandonner la peinture philosophique, à laquelle l’Allemagne doit une partie de son caractère, elle fera bien de se rapprocher de l’homme et de la nature, de pénétrer dans la vie positive du foyer, et de se raconter elle-même avec les tristesses et les joies de la chaumière.

L’Autriche, qui forme un rameau important et distinct de l’arbre germanique, témoigne une prédilection encore plus marquée pour les tableaux de genre. Parmi ces derniers, un de ceux qui appellent le plus l’attention des visiteurs est la Réception d’un apprenti, par le professeur Waldmüller. Un joyeux charpentier admet dans son atelier le fils d’une honnête paysanne avec les honneurs et les cérémonies en usage dans les corporations allemandes. C’est une fête à laquelle les enfans de la maison et les autres apprentis mêlent tout le brouhaha d’une école en vacances. La Veille de Noël nous reporte aussi aux anciennes coutumes conservées dans quelques pays catholiques : une réunion de garçons et de filles contemple avec extase ou avec tristesse les dons déposés par la main du Christ dans les souliers des bons enfans, et les souliers vides, qui annoncent la désobéissance des mauvais sujets. Pourquoi faut-il que la manière de l’artiste rappelle beaucoup trop les peintures sur porcelaine ? Dans une Foire de chevaux en Hongrie, avec les charrettes couvertes de toiles, les bœufs, les chevaux déliés, toute une foule d’hommes et