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théologiens disent le contraire, contracter avec moi, votre fils ; et, comme ils ne nous ont pas donné assez de réalités pour nous encourager à nous contenter d’incertitudes, j’ai jugé convenable, moi, votre fils, de laisser ma promesse de mariage au roi d’Espagne dans les mains de mylord Bristol, qui la lui remettra lorsque l’autorisation de remettre la dispense viendra de Rome. Quant à l’affaire du Palatinat, nous avons découvert les deux obstacles : d’abord ils disent qu’ils n’ont aucun espoir d’accommodement sans le mariage de votre petit-fils avec la fille de l’empereur. Nous savons que la proposition de ce mariage vous convient ; mais nous ne savons pas si votre gendre et votre fille, et vous-même, vous vous arrangerez de la condition que votre petit-fils soit élevé à la cour de l’empereur. Le second obstacle, c’est qu’on veut bien rendre au palatin ses domaines et à son fils le rang et les droits d’électeur avec les domaines ; mais ils ne veulent pas s’engager à rendre ce rang et ces droits au palatin, votre gendre, lui-même. Quant à la dot et aux intérêts matériels, nous vous en rendrons un compte exact quand nous aurons le bonheur de baiser les mains de votre majesté. »

Le même jour 9 septembre, pour bien constater que, si la célébration du mariage restait encore en suspens, l’engagement mutuel et définitif était en pleine vigueur, l’infante écrivit elle-même au roi Jacques : « J’ai été heureuse de recevoir la lettre que votre majesté a bien voulu m’adresser et par laquelle elle me témoigne tant de bienveillance et d’affection. Quoique j’éprouve ces sentimens dans la même mesure et à un égal degré, je reconnais que de la part de votre majesté ils sont pour moi une faveur, et je désire avoir quelque occasion de répondre (autant qu’il est en mon pouvoir) à un si grand bienfait, J’ai aussi à satisfaire au bon plaisir du roi, mon seigneur et frère, qui aime et estime si hautement votre majesté, ainsi que tout ce qui lui appartient. Que Dieu garde votre majesté comme je le désire !

« Votre très affectionnée,

« MARIE. »

Depuis longtemps déjà, l’infante avait reçu les présens de mariage ; on commençait à former sa maison ; elle portait le titre de princesse d’Angleterre, prenait assidûment des leçons d’anglais, et quand les deux ambassadeurs ordinaires du roi Jacques, lord Bristol et sir Walter Aston, paraissaient devant elle, ils n’avaient garde de rester la tête couverte selon l’usage espagnol, la considérant non plus comme infante, mais comme leur princesse.

Quand le bruit du prochain départ du prince de Galles se répandit dans Madrid, on s’en étonna, on en chercha le sens et la cause, on se demanda s’il avait quelque inquiétude d’être retenu contre