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est le laboratoire de chimie, le musée de minéralogie, la pharmacie, la philharmonique ou école de musique, l’école des garçons et des filles, les ateliers de tissage pour les femmes. Au milieu est l’église, dont le curé joint à ses fonctions celles de maître d’école. Puis vient l’hôpital, auquel est attaché un médecin. Sur le dernier côté de la place s’élève le palais dont M. Larderel avait fait sa résidence. Il ne manquait rien à cette splendide habitation, pas même un théâtre, où les ouvriers venaient jouer. L’habile et honnête industriel qui faisait un si noble emploi de sa fortune avait reçu successivement de tous les princes de l’Europe les récompenses qu’il méritait. Le grand-duc l’avait le premier décoré, anobli. Le comte de Larderel de Monte-Cerboli, reconnaissant envers les lagoni, source de ses grandes richesses, avait pris pour armes un soffione s’échappant du sol comme la fumée d’un cratère. Ces armes parlantes, ce blason d’un nouveau genre, lui avaient valu de la part des jaloux et des mauvais plaisans le nom d’il conte Fumo ; mais il laissait dire, et, se reportant au temps peu éloigné où il débitait encore à Livourne des fusils et des soieries de Saint-Étienne, il était fier de ses rapides succès et des honneurs qui lui arrivaient. Il prenait soin d’étaler ses décorations, et j’ai vu à Monte-Cerboli, dans une salle à côté du laboratoire de l’usine, au milieu d’un magnifique cadre doré, toutes les croix et tous les rubans de ce monde. Le contre-maître de la fabrique conduisait religieusement le visiteur dans cette salle après lui avoir montré les lagoni ; c’était comme le bouquet de la fin. Disons tout de suite que M. Larderel avait comme industriel de grandes qualités qui rachetaient ce petit excès d’amour-propre ; on n’arrive pas sans quelque talent à la haute fortune où il était parvenu.


V. — LES SALINES DE VAL-DI-CECINA. — VOLTERRA, SES ALBATRES ET SES RUINES ETRUSQUES. — MONTE-CATINI.

De l’usine de Monte-Cerboli, je me dirigeai sur Volterra, dont je voulais visiter les ruines étrusques et les carrières d’albâtre. Chemin faisant, je rencontrai aussi d’autres sujets d’étude, et cette dernière partie de mon voyage m’offrit tout l’attrait de mes précédentes excursions. En sortant de Larderello, je remarquai d’abord près de la route les bains d’eaux minérales de San-Michele. Ces eaux, comme celles de Morbo, situées entre Castelnuovo et Monte-Cerboli, sont acidulés, sulfureuses, et marquent au thermomètre 35 degrés. La température et la composition de ces sources n’étonneront assurément personne, si l’on tient compte du voisinage des soffioni.

De San-Michele, j’arrivai bientôt à Pomarance, dont les murs et