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vieillard mettait sa bête au pas, mais il causait tout le long du chemin, et le charme de son instructive conversation rompait l’ennui d’une marche aussi lente.

Les anciennes mines exploitées par la république de Massa, que me fit visiter M. Rovis, me remplirent d’étonnement, comme celles des Étrusques, que j’avais parcourues à Campiglia. Les exploitations du territoire massétan indiquent une connaissance plus parfaite du terrain ; on devine que la science va se faire, que la géologie est sur le point de naître. Ces travaux, étant beaucoup plus récens, offrent également au visiteur des moyens d’étude que ne leur présentent plus les premiers. Ainsi on a retrouvé dans les galeries du moyen âge les pics en fer à tête carrée et à pointe acérée dont se servaient les mineurs pour abattre la roche, et les sacs en peau de chamois dans lesquels on portait le minerai. Dans les chantiers, la lampe fumeuse du travailleur a laissé une trace encore visible le long des parois. Autour des fronts de taille disparus, on aperçoit toujours la marque formée par les bûchers que l’on allumait du samedi soir au lundi matin pour étonner la roche et en rendre l’abatage plus facile. En d’autres endroits, les câbles qui servaient à monter le minerai ont produit au ciel des galeries, à l’entrée, une suite de stries profondes, effet de l’usure. Ces sortes de cannelures indiquent un travail de plusieurs siècles, et c’est ainsi que, dans les vieux cloîtres, la margelle du puits au milieu de la cour est marquée sur tout son pourtour de vides semblables, occasionnés également par le passage des cordes longuement répété.

Je remarquai dans ces anciennes mines la trace laissée par le pic sur les parois des galeries ; mais j’avais déjà observé ce fait dans les chantiers étrusques de Campiglia, antérieurs à ceux de Massa d’un si grand nombre de siècles. Je n’eus donc pas sujet de m’étonner cette fois si, sur quelques points, le travail ne semblait dater que d’un jour, tant les marques étaient encore nettes et distinctes. Comme à Campiglia, je retrouvai en place les étais de bois soutenant le toit des galeries, ainsi que les murs en pierre destinés à remblayer les vides ; comme à Campiglia, les eaux dégouttant du plafond de ces souterrains ont formé des stalactites, mais ici elles se sont facilement rejointes à cause des dimensions moins considérables que présentent les travaux. Ces colonnes naturelles arrêtent en plus d’un endroit la marche du visiteur, et semblent placées là à dessein pour l’avertir de l’ancienneté de ces exploitations.

Quelques-unes des galeries que je visitai ont une direction rectiligne sur une très grande longueur, comme nos tunnels de chemins de fer : elles offrent partout les mêmes dimensions ; enfin un petit canal est ménagé latéralement avec une pente uniforme pour l’écoulement des eaux au dehors. Tous ces détails indiquent une grande