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les sépales, les pétales, les étamines, le fruit et la graine ; dans les animaux, les pieds, les mains, les ailes, les nageoires, etc. Tous ces organes si variés peuvent se ramener à l’unité ; tous ont pour base un seul et même organe qui se transforme à l’infini et s’adapte aux fonctions les plus diverses. Afin d’être mieux compris, je commence par le règne animal, et dans ce règne par la classe dont nous faisons partie, les mammifères. J’examine quelles sont dans cette classe les modifications du membre supérieur ou antérieur. Chez l’homme, c’est une main, organe de précision par excellence, se prêtant à toutes les exigences de la volonté, docile instrument de la pensée humaine pour l’accomplissement de toutes les merveilles des arts et de l’industrie. Cette main si parfaite se dégrade déjà dans le singe. Pourvu de quatre mains et non de deux pieds et de deux mains comme l’homme, le singe marche ou grimpe à l’aide de ses mains, tandis que chez l’homme la main n’est jamais un organe de progression, mais reste toujours au service de l’intelligence. Chez quelques singes (colobe, atèle), le pouce disparaît : c’est un degré de dégradation de plus ; mais l’organe est toujours reconnaissable. Il ne l’est plus dans la chauve-souris. La main est devenue aile, et cependant sa structure n’a pas changé ; le pouce est réduit à un simple crochet, les doigts, démesurément longs, sont unis par une membrane qui enveloppe tout le corps, l’organe de préhension est métamorphosé en une aile, et, sans rien créer de nouveau, la nature fait succéder à des animaux essentiellement grimpeurs des êtres dont la vie est exclusivement aérienne, car la chauve-souris ne peut ni marcher, ni grimper, elle ne peut que voler. Cependant tous ses caractères la rapprochent du singe et de l’homme. Sa place est marquée à la tête de la série des mammifères dont elle présente tous les caractères. Nous arrivons aux carnivores : ici plus de différence sensible entre les membres antérieurs et les membres postérieurs. L’extrémité prend le nom de patte ; les doigts ne sont ni longs ni séparés, l’organe, n’est plus un organe de préhension : un chat et un chien ne saisissent un objet qu’en le pressant entre leurs deux pattes de devant ; leurs membres et leurs doigts sont des organes de progression, et ils marchent sur la pointe de leurs ongles. Chez l’ours, un talon imparfait permet une station verticale oblique dont la gaucherie excite les rires de l’enfant qui a déjà le sentiment d’une station verticale parfaite. La patte du chat, celle de l’ours, jouissent encore d’une grande mobilité, et par suite d’une certaine adresse : leurs membres antérieurs ne sont pas uniquement des organes de progression, mais servent encore à saisir et à fixer une proie. Il n’en est plus de même dans les ruminans et dans les solipèdes ; chez un bœuf, un mouton, un cerf ou un cheval,