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royale. L’ordonnance fut rendue le premier jour du premier mois de la sixième année du règne de Teu-Deuc[1].

Le délégué en mission royale, commissaire visiteur de l’extrême midi, le nguyên Tri-phuong, constata qu’un an plus tard, dans les six départemens, il se trouvait six régimens « à la date de Teu-Deuc[2]. » Il adressa les registres au ministre, et envoya des mandarins dans toutes les directions pour exhorter de la manière la plus pressante les chefs de recrutement à emmener.les gens pauvres et les gens errans sur les terrains désignés pour la culture. Le nguyên, à la suite de ses inspections, conclut qu’il était prudent de ne pas exiger tout d’abord l’effectif complet[3].

Au premier appel, ces six régimens avaient bien présenté trois mille hommes ; mais il avait fallu retrancher les vieillards, les malades, les orphelins, et le chiffre se trouva réduit à deux mille cinq cent quinze hommes. Comme on peut le remarquer, le commissaire visiteur de l’extrême midi ne perdait pas un seul instant sa création de vue.

L’institution des don-dien fut complétée l’année suivante par un nouveau décret qui conservait l’organisation des régimens et des capitaineries, et qui instituait des âp (petites agrégations communales) sous la dépendance du pouvoir civil. Tout Annamite fut admis à faire valoir son influence personnelle et à lever sous la dépendance du long (chef de canton) des âp de trente, cinquante et cent hommes. Ces chefs eurent le titre de dot, le rang et les attributions de chef de village, avec cette différence cependant qu’ils administraient sans conseil municipal ; mais ils relevaient du tong et non d’un chef de don-dien, et occupaient ainsi une sorte de position intermédiaire entre les premiers colons et les paysans des villages ordinaires.

Ces agrégations de seconde formation furent souvent inspectées par Tri-phuong, et les colons encouragés et exhortés. Chaque homme avait deux, trois ou quatre arpens. Ces don-dien étaient inscrits ainsi que leurs terrains, et devaient payer en dix ans tous les genres de tribut. Malgré les exhortations, les gens errans venaient difficilement s’établir sur les terrains maigres. Dans un de ses rapports, le nguyên demande « qu’on tienne compte des vraies difficultés, et qu’on ne refuse pas les distinctions promises. Il présente cette prière à sa majesté, en s’inclinant profondément pour attendre l’examen de sa sainte pénétration. »

Le nombre des régimens de don-dien, après tous ces tâtonnemens, fut fixé d’une manière définitive à vingt-quatre, ainsi répartis : sept régimens dans la province de Gia-dinh, six dans celle de My-tho, cinq dans celle de Vinh-long, quatre dans la province de Bien-hoa, et deux dans celle de An-niam. Chaque régiment porte le nom du canton qu’il a formé : ainsi le régiment de Gia-trung forme le canton de Gia-trung, Chaque compagnie, de la pre-

  1. 1854. Nous sommes dans la quatorzième année.
  2. Dans le pays d’Annam, on date les années de l’avènement du roi.
  3. « Dans le centre, où la terre est arrosée, grasse et abondante, le commerce est actif et procure l’aisance ; les colons arrivent en foule et avec joie, et la règle des appels de cinq cents hommes pour les régimens et de 50 hommes par compagnie est exigée et suivie. Ailleurs la terre est maigre, de difficile culture, isolée comme dans un désert. Les régimens sont réduits à trois ou quatre cents hommes. Il serait bien dur d’imposer pour ceux-ci l’effectif complet. »