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les victimes et non les partisans de la révolte. Cette déclaration parut leur causer un grand étonnement.

Il n’est pas impossible en définitive qu’un des résultats de cette insurrection qui, sous plusieurs rapports, place nos coreligionnaires dans une situation très fausse et très dangereuse, ne soit de développer et d’accroître l’influence des idées chrétiennes. Mis journellement en contact avec toutes les classes de la population et dans les circonstances les plus critiques, les chrétiens ont pu faire apprécier les sentimens qui les animent. On les a vus, aux environs de Shang-haï, adoucir autant qu’il était en eux les désastres de la guerre, former des ambulances, parcourir les champs de bataille, prodiguer leurs soins aux blessés des deux partis. Ce spectacle n’a pas dû laisser la population chinoise indifférente. Les missionnaires, qui lui donnent de si nobles exemples, n’agissent pas moins fortement sur elle en appliquant leurs soins à l’instruction de la jeunesse. À cette même époque de 1844, ils multiplièrent les maisons d’éducation. Du moment que fut promulgué l’édit impérial qui facilita, qui rendit possibles tant d’améliorations, on consacra une partie des ressources fournies par la charité européenne à recueillir et à élever de jeunes Chinois destinés à être envoyés plus tard dans toutes les parties de la Chine. Dès 1843, des tentatives avaient été faites dans ce sens ; mais elles ne commencèrent à être couronnées de succès qu’après la disparition des obstacles de toute nature que l’ancienne législation y apportait. On entrait ainsi dans une voie féconde : ces enfans, formés dans des collèges ou remis entre les mains de familles chrétiennes, n’ont plus aucun des préjugés que leurs compatriotes entretiennent contre nous. On trouvera en eux un jour d’utiles auxiliaires ; c’est par eux que nos croyances et nos traditions pénétreront le plus sûrement dans l’empire du milieu. En accomplissant à leur égard une mission d’humanité, on prépare pour l’avenir des défenseurs au christianisme, des pionniers à la civilisation.

Quels ont donc été les résultats de la première ambassade française en Chine ? Après avoir assuré à nos nationaux par le traité de Whampoa les avantages concédés à l’Angleterre, ainsi qu’aux États-Unis par des traités antérieurs, et mis ainsi la France en possession du titre à l’aide duquel elle a pu intervenir plus tard dans les affaires de la Chiné, M. de Lagrené s’est étudié à faire donner à nos intérêts moraux et religieux toute la satisfaction que les circonstances comportaient. Il a tenu surtout à faire prévaloir dans les rapports de la cour de Pékin avec ses propres sujets le principe de la tolérance religieuse, la rentrée sous le droit commun de tous les Chinois chrétiens, quelle que fût la communion à laquelle ils appartinssent. Les