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« Houang-tcheou, il y a trois ans, n’avait pas un seul chrétien ; d’après le cours ordinaire des choses, il ne pouvait même en avoir de si tôt, placé, comme il est, à une distance énorme de toutes les autres chrétientés, et reculé dans un coin de la province par où les missionnaires n’ont jamais occasion de passer. Cependant on y compte aujourd’hui plus de deux cents baptisés et huit cents catéchumènes déjà bien instruite. Au dire de tous ceux qui connaissent le pays et les néophytes, Houang-tcheou, dans peu d’années, doit avoir dix mille nouveaux chrétiens. Là en effet l’Évangile ne » s’annonce pas seulement à l’oreille, il se prêche vraiment sur les toits et trouve de l’écho partout, à tel point que nous pouvons appliquer à cet arrondissement du Ho-nan ce que Tertullien disait du monde entier : « Nous ne sommes que d’hier, et déjà nous avons tout rempli, les villes, les campagnes, les écoles, les tribunaux, les maisons.des grands ; nous ne laissons vides que les temples. »


En cherchant nos exemples dans d’autres parties de l’empire, nous voyons Mgr Maresca, administrateur du diocèse de Nankin, le plus considérable de la Chine, sa féliciter dans une lettre du mois de mars 1849 des progrès qui ont été réalisés. L’évêque de Juliopolis, vicaire apostolique du Chan-tong, rendant compte, le 15 juin 1852, de l’état de son vicariat, dit qu’en 1843 on n’y comptait que six chapelles ou plutôt six cabanes, et que depuis on y a construit vingt-deux chapelles, dans lesquelles le service divin peut être très convenablement célébré. Mentionnons enfin l’extrait d’une lettre écrite de Zi-ka-wei, le 29 septembre 1855, par le père Fournier, visiteur de la compagnie de Jésus : « Le résultat déjà obtenu, dit-il, dépasse tout ce qu’on espérait il y a quelques années. Nos pères, qui sont venus ici les premiers, eh jetant aujourd’hui leurs regards en arrière, peuvent à peine revenir de leur étonnement en voyant le pas immense que la mission a fait. »

Il serait aisé de multiplier ces citations. N’oublions pas cependant que le terrain n’était point partout aussi favorable. Un vicariat perdait souvent une partie de ce que l’autre avait gagné. Le vieil esprit d’intolérance n’avait pas disparu ; dans plus d’une localité, on en reconnaissait les symptômes. Le moment approchait où le retour au pouvoir du parti hostile aux étrangers allait soumettre de nouveau les chrétiens à des épreuves douloureuses. Toutefois l’ensemble des informations données par les missionnaires pendant les années qui suivirent l’édit de 1844 signalé un véritable progrès. Sous l’empire de la nouvelle législation, le christianisme entrait peu à peu dans les mœurs chinoises et y mettait son empreinte. Les tracasseries ou le mauvais vouloir de certaines autorités locales ne l’empêchaient pas d’exercer sa bienfaisante influence sur les populations. Les Chinois remarquaient que les différends entre les chrétiens