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LA
MAREMME TOSCANE
SOUVENIRS DE VOYAGE.

I.
LE LITTORAL DE LA MER TYRRHENIENNE.

Au commencement du mois de septembre 1858, je me trouvais à Livourne. Je revenais d’une excursion à Pise, Lucques, Florence et Sienne, ces grandes cités toscanes que nul voyageur en Italie ne saurait se dispenser de visiter, et que j’avais déjà plusieurs fois parcourues. Le port franc de Livourne, sans cesse animé et bruyant, me présentait pour unique spectacle sa population de marchands affairés, venus de tous les coins de la Méditerranée. Tous les jours, vers l’heure de midi, la via Ferdinanda se changeait en bourse en plein vent, où se pressait une foule compacte sur la chaussée et les trottoirs. Dans le quartier nommé la Nouvelle-Venise à cause des nombreux canaux qui le coupent, le mouvement commercial ne le cédait en rien à celui de la rue Ferdinande ; mais j’étais un voyageur de passage qu’aucune affaire n’amenait. Aucun navire chargé de blé arrivant des bords du Danube n’était dirigé à mon adresse, et à part la nécessité où j’étais quelquefois de troquer avec perte quelques pièces de 20 francs contre l’affreuse monnaie du pays, je n’avais avec les changeurs juifs de Livourne aucune relation qui pût me retenir dans ce port. Si ces honnêtes négocians ne se souciaient que médiocrement de mon humble clientèle, les commis de place, les ciceroni,