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paix elle-même. Cette cause, on ne peut la chercher que dans les variations subies depuis 1848 par les institutions françaises. Il n’y a pas de conclusion qui ressorte de l’histoire de France depuis soixante ans avec plus d’évidence que celle-ci: les entraînemens de la France vers la guerre, les dépenses de la France en arméniens de terre et de mer, ont toujours été en raison inverse de l’influence qui a été départie chez nous aux chambres représentatives et à la presse. On a souvent parlé en France du gouvernement à bon marché; il est certain que toutes les fois que l’on a pu ou que l’on pourra réaliser en France le gouvernement à bon marché, les autres nations du monde pourront, elles aussi, obtenir sur le prix de revient de leur gouvernement d’importantes économies. A quelles conditions peut-on avoir en France un gouvernement plus économique? Pour répondre à cette question, il n’est pas même nécessaire d’invoquer les souvenirs des régimes politiques passés; il n’est pas besoin de remonter aux budgets patriarcaux de l’ère parlementaire. Les inductions que l’on peut tirer de l’expérience présente suffisent. Toutes les fois que le gouvernement actuel de la France fait un effort sérieux d’économie ou de réforme financière, par quel effet immédiat cet effort est-il révélé et consacré? Le gouvernement, par un mouvement simultané, tend à élargir les attributions, à accroître les prérogatives de l’assemblée représentative.

Ainsi l’expérience elle-même du régime présent démontre que le progrès des économies dans l’administration financière dépend chez nous de la part progressivement plus grande que la chambre pourra prendre au gouvernement. Les hommes politiques d’Angleterre qui gémissent des stériles prodigalités financières auxquelles, par une funeste émulation, se condamnent aujourd’hui les deux premières nations de l’Europe, M. Bright, M. Cobden, qui vient de résumer ses griefs contre un tel état de choses dans une remarquable brochure. Les trois Paniques, M. Disraeli lui-même, lord Palmerston enfin, devraient voir clairement où est la solution pratique de la contradiction économique dont souffrent à la fois l’Angleterre et la France. L’allégement financier des deux pays ne peut être que proportionnel aux progrès de la liberté politique chez nous. Les hommes d’état dont nous parlons pensent-ils par hasard qu’ils ne peuvent rien pour accélérer ces progrès? Nous aimerions mieux, cela va sans dire, que la cause libérale en France ne fût redevable qu’à elle-même des conquêtes auxquelles elle aspire. Nous pensons cependant qu’elle pourrait être utilement secondée par les hommes politiques d’Angleterre auxquels nous faisons allusion. A divers titres, ces hommes politiques peuvent se vanter d’avoir exercé plusieurs sortes d’influences sur notre gouvernement. Lord Palmerston est convaincu qu’il n’a pas peu contribué à nous faire accepter l’unité italienne. M. Cobden a le droit de penser sans faux orgueil que le crédit acquis par lui dans les régions les plus élevées de notre gouvernement n’a pas peu servi à introduire en France les premiers élémens du libre échange. Que M. Bright,