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lations de crédit ne semblaient devoir réduire ce découvert à 104 millions.

Le budget de 1861, sur lequel ne sont encore publiés aucuns renseignemens officiels, présentera, sur les premières prévisions, un excédant de dépenses à peu près égal. Dans son mémoire à l’empereur, M. Fould annonçait des crédits extraordinaires pour plus de 200 millions. Malgré un excédant de 79 millions sur les prévisions de recettes, le rapport à l’empereur qui précède le budget de 1863 prévoit pour 1861 un découvert probable de 181 millions, sauf réductions pouvant résulter des annulations de crédits. Il est malheureusement trop probable que ce découvert sera dépassé, et que l’excédant des dépenses sur les prévisions ne se bornera pas aux 200 millions dont parlait M. Fould.

De 1852 à 1861, sans une seule exception, le règlement des budgets a fait ressortir un excédant de dépenses considérable sur les prévisions. En faisant le calcul pour les dix années, on arrive à 3 milliards; abstraction faite des années de la guerre de Crimée et de la guerre d’Italie, la moyenne annuelle reste au-delà de 200 millions. Le règlement définitif du budget de 1863 dépassera donc de beaucoup, il n’est pas permis d’en douter, les 2 milliards 91 millions qu’on demande au corps législatif de voter. La suppression des crédits extraordinaires et supplémentaires et le remplacement de ces crédits par les viremens ne peuvent, je crois l’avoir prouvé[1], supprimer les causes qui forçaient de recourir à ces crédits, et, tant que ces causes subsisteront, il faut s’attendre à en avoir les résultats, sous quelque forme et sous quelque nom que ce soit. Ce sera certainement une amélioration que l’obligation de présenter des budgets rectificatifs supplémentaires, mais est-ce là un frein suffisant? Que pourra faire le corps législatif lorsque, l’exercice du droit de virement ayant épuisé les ressources du budget voté, on viendra lui présenter des lois spéciales pour faire face à des dépenses comme celles de la guerre du Mexique, de l’expédition de Cochinchine, ou d’autres entreprises commencées? Il ne pourra faire autrement que de voter les fonds.

Croire que l’élévation des budgets présentés, quelle qu’elle soit, suffira pour prévenir le recours à des lois spéciales destinées à pourvoir à des besoins imprévus, ce serait se faire une illusion volontaire. Si le corps législatif n’y met obstacle, n’est-il pas possible que l’entraînement des dépenses utiles ne dispose trop à recourir à la présentation de ces lois, comme on s’était habitué aux crédits extraordinaires, malgré beaucoup de promesses d’une part, malgré beaucoup de protestations de l’autre, malgré les observations de la

  1. La Réforme financière, — Revue du 15 février 1862.