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la Cordillère centrale de la chaîne des Andes. Cette Cordillère, qui sert pour ainsi dire d’épine dorsale au nouveau continent sur la prodigieuse longueur de 14,000 kilomètres, presque en ligne droite, se présente diversement dans les diverses régions. Après avoir atteint sa plus grande hauteur et sa masse la plus épaisse dans l’Amérique méridionale, elle constitue entre les deux Amériques la surprenante chaussée de 2,300 kilomètres de long qu’on désigne sous l’appellation assez modeste de l’isthme de Panama, non sans y offrir plusieurs dépressions fortement accusées qui semblent inviter l’industrie humaine à ménager la jonction des deux océans. Une fois au Mexique, la grande Cordillère s’étale de manière à occuper la majeure partie de l’espace entre les deux mers, quoique cet espace aille sans cesse en s’étendant à mesure qu’on s’avance vers le nord. De là une région suspendue au-dessus de l’Océan à une hauteur qui est, au midi des villes de la Puebla et de Mexico, dans la Mixteca, de 1,500 mètres, — c’est-à-dire la même que celle du Ballon d’Alsace, la cime culminante des Vosges, — à la Puebla de 2,196 mètres[1] et à Mexico de 2,274. Au nord de Mexico, la belle ville de Guanaxuato, célèbre par les mines d’argent qu’on exploite dans son voisinage, est à l’altitude de 2,081 mètres, c’est-à-dire sensiblement en contre-bas de la capitale; au-delà de Guanaxuato, le terrain se relève de nouveau.

De la surface du plateau s’élancent quelques montagnes dont plusieurs dressent leur sommet jusque dans la région inhospitalière des neiges éternelles. Telles les deux au pied desquelles sont bâties, du côté du midi, la belle ville de la Puebla, du côté du nord la capi- tale, Mexico, et qui ont conservé leurs noms aztèques, Tlstaccihuatl (la femme blanche) et le Popocatepetl (montagne fumante)[2] ; elles montent jusqu’à 4,786 et 5,400 mètres. Tel, à une petite distance de Mexico, le Nevado de Toluca : il s’élève à 4,621 mètres ; mais, quelque colossales qu’elles soient, ces saillies du terrain ne sont que des accidens sur la grande étendue du plateau. Elles sont même resserrées sur une zone fort étroite. Les six grandes montagnes du Mexique, à savoir les trois qui viennent d’être nommées et trois autres qui n’attirent pas moins les regards, le pic d’Orizaba, le Coffre de Perote et le volcan de Colima, sont rassemblées sur une même ligne parallèle à l’équateur, entre le cercle de 19 degrés de latitude et celui de 19 degrés 1/4. A part la bande étroite que marquent ces majestueuses cimes, le plateau mexicain se prolonge au loin vers le nord avec des ondulations qui n’en changent notablement l’altitude que sur de longues distances. D’immenses plaines, qui parais-

  1. Les altitudes données ici pour la Puebla, Mexico et Guanaxuato sont celles du sol de la Plaza Mayor.
  2. C’est un volcan qui brûle encore.