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rechercher les moyens d’assurer l’équilibre du budget, décider de quelle façon cet équilibre devra être obtenu, si c’est par des réductions de dépenses ou par des aggravations d’impôts, étudier dans une première expérience si les moyens de contrôle qui, viennent d’être départis au corps législatif sont suffisans ou incomplets, telle est l’affaire principale, la grosse besogne de la session actuelle, l’œuvre au succès de laquelle l’honneur du gouvernement et de la chambre est attaché cette année. Quand une assemblée a devant elle une tache semblable, elle doit n’en être détournée qu’à de rares occasions, ou du moins il faut sans cesse l’y ramener. À côté de ce grand intérêt de la présente session, auquel une discussion laborieuse et habile peut rattacher naturellement les plus hauts intérêts du pays, nous voyons deux vastes questions qui, tant qu’elles ne seront pas résolues, devront entretenir au sein de la chambre et dans le pays une vive controverse : la question intérieure, qui vient se résumer dans la question de la presse, et la question extérieure qui nous touche le plus directement aujourd’hui, la question romaine. La façon dont le débat a dû nécessairement s’engager à propos de l’adresse n’a guère été utile à la marche de ces diverses questions. Au lieu de la mettre en saillie, l’adresse a plutôt fait perdre de vue la réforme financière. La question de la presse et la question romaine ont perdu soit à être confondues dans un débat qui embrassait des sujets trop divers et trop peu homogènes, soit à n’être pas traitées au moment le plus favorable.

La question de la liberté de la presse est en ce moment pour la France la question intérieure par excellence. On l’a dit, la liberté de la presse est la sanction unique et suprême de toutes les autres libertés. Là où la presse n’est point assurée de sa liberté, aucune liberté n’est sûre. Les défenseurs de la liberté de la presse ont sur leurs adversaires cet avantage de leur rendre impossible la discussion et l’apologie du système contraire. Ils ont tout pour eux : la logique, l’histoire, les principes les plus justes et, les mieux avérés de la révolution française, les nécessités pratiques les plus évidentes de l’économie des sociétés modernes. Cette année, nous le reconnaissons volontiers, les intérêts de la liberté de la presse ont été mieux soutenus au corps législatif qu’en aucune occasion antérieure. Le spirituel bon sens de M. de Pierre, l’argumentation aiguisée de M.. Picard, quelques expressions éloquentes de M. Jules Favre, çà et là les regrets, les aveux voilés qu’ont laissé entrevoir des membres du parti catholique, ont montré que la cause de la liberté de la presse commence à faire son chemin et rencontre chez beaucoup d’esprits un meilleur accueil. La discussion n’a point eu encore pourtant la vigueur, la puissance et l’efficacité que les orateurs eussent pu lui donner. L’on a remarqué que les membres de l’opposition ont cru devoir renfermer dans leur amendement sur la politique intérieure trois questions qu’il eût mieux valu séparer : la presse s’y trouvait mêlée à la loi de sûreté générale et aux exceptions dont souffre à Paris et à Lyon