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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 mars 1862.

Nous avons remarqué chez certaines personnes une tendance à imputer à la liberté politique la responsabilité des inconvéniens, des abus, des excès de parole auxquels ont pu donner lieu les débats de l’adresse au sénat et au corps législatif. Parmi ceux qui font peu de cas de la liberté, on sent comme une inclination instinctive et secrète à prendre texte de la stérilité de nos discussions de l’adresse pour condamner tout nouveau progrès vers les réalités du régime représentatif. Il nous est impossible de laisser une telle arme aux adversaires de la liberté. Il faut que tout le monde entende bien que le régime parlementaire n’a rien à démêler avec les stériles tournois de discours auxquels nous assistons depuis deux ans.

Du temps du régime parlementaire, tous les esprits sensés étaient frappés de l’inutilité et des abus des longs débats de l’adresse. Rien ne paraissait moins logique et moins pratique que cette façon de délibérer sur toutes les questions politiques à la fois. Tout le monde voyait là une perte de temps inutile, et si le régime parlementaire eût duré, il est certain qu’à l’heure qu’il est les discussions de l’adresse eussent été progressivement ramenées à ce qu’elles sont dans les chambres anglaises, à ce qu’elles doivent être au sein de tout parlement constitué pour la bonne expédition des affaires, à une pure formalité, à une simple cérémonie qui ne doit pas faire perdre plus d’une séance aux assemblées représentatives. Cependant, sous le régime parlementaire, ce système de délibération encyclopédique avait au moins un motif et par conséquent une excuse. Il y avait au fond du débat une question, la question de savoir si le ministère conservait ou avait perdu la confiance de la chambre. Le vote de l’adresse avait donc un résultat et une sanction, le maintien ou le changement du cabinet. La question de confiance aurait pu sans doute être résolue avec une moindre perte de temps ; mais enfin c’était un résultat très positif que de trancher