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nécessité de reboiser les montagnes et de couvrir de plantations les bords des torrens jusqu’à leur embouchure, pour rompre la violence de leurs eaux. Rappelant les merveilleux effets des anciens canaux d’arrosage qui fertilisaient depuis neuf siècles une partie du Roussillon, il proposait d’en ouvrir de nouveaux et d’y consacrer, outre les souscriptions particulières, les fonds des ateliers de charité. Il réclamait la suppression ou l’adoucissement du droit perçu sur les huiles, qui mettait obstacle à la culture de l’olivier. Recherchant la cause du bas prix où étaient tombés les vins, il se demandait s’il ne serait point possible d’ouvrir des souscriptions pour envoyer directement des bâtimens chargés de vin en Angleterre et en Amérique. Enfin, le pays produisant des laines qui avaient alimenté autrefois un grand commerce de draperie, il proposait, pour les améliorer, l’achat de deux cents béliers des meilleures races d’Afrique et d’Espagne. Ce projet ne put recevoir de réalisation immédiate ; mais, exécuté douze ans après par l’administration départementale, il a doté le Roussillon d’une race ovine justement estimée.

Pour la formation des assemblées secondaires, la province était divisée en deux districts, subdivisés eux-mêmes en sept arrondissemens, chefs-lieux Perpignan, Elne, Thuir, Arles, Vinça, Olette et Saillagousse. Ces bourgs ne sont aujourd’hui que des chefs-lieux de canton. La seconde ville du département et la plus riche en souvenirs, Elne, dont le nom vient de l’impératrice Hélène, mère de Constantin, n’est plus même un chef-lieu de canton.

Nous avons passé en revue vingt généralités sur vingt-six, dont se composaient les pays d’élection. Dans toutes, excepté trois, les assemblées provinciales s’étaient constituées, et dans celles où elles n’avaient pu s’organiser complètement, la Saintonge, le Limousin et la Guienne, elles ne rencontraient qu’un obstacle passager. Elles n’avaient reçu une véritable atteinte qu’en Auvergne, et là ce n’était pas la résistance du passé, mais l’impatience de l’avenir qui mettait en question leur existence. Il nous reste à étudier les six généralités de l’est de la France. Dans quatre d’entre elles, celles de Nancy, de Metz, de Strasbourg et de Lyon, nous trouverons encore les assemblées provinciales en pleine activité et en plein succès. Deux seulement, celles de Besançon et de Grenoble, nous présenteront un spectacle différent ; c’est surtout dans le Dauphiné que nous verrons reparaître et grandir, à la faveur de circonstances historiques, le mouvement dont l’Auvergne avait donné le signal, et qui, se répandant de proche en proche, finit par faire tout échouer. Ce ne sera plus une réforme, mais une révolution.

Léonce de Lavergne.