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de Liverpool de payer sa part de l’income-tax et des assessed taxes, c’est-à-dire des taxes sur les maisons, les domestiques, les chevaux, les armoiries, etc.[1]. Rien ne montre l’empire d’un besoin, la puissance d’une idée progressive comme les sacrifices d’argent qu’elle sait obtenir ; c’est à cette épreuve qu’on voit les convictions. La foi qui contribue est une foi sincère.

Somme toute, je sais bien ce qui étonnera, ce qui choquera le plus un lecteur français à l’aspect de ce pouvoir municipal. On va me dire que j’ai déployé là une longue liste d’attributions, mais qu’apparemment je ne l’ai pas épuisée. Et les écoles ! et le culte ! et l’hôpital ! et la route ! et le théâtre ! il n’y en a pas trace dans ce catalogue. Est-ce que les bourgs, les corporations de la Grande-Bretagne n’ont pas le droit et même l’obligation précise de pourvoir à ces services ? Eh ! mon Dieu, non ; mais ne vous inquiétez pas de ces choses que les corporations peuvent négliger. Vous êtes en présence d’une société qui saura bien y pourvoir. Ces services se font d’eux-mêmes avec des ressources, tantôt qui leur appartiennent en propre, tantôt publiques, tantôt privées, qui en tout cas n’attendent rien des corporations.

Parlons d’abord de l’église. Elle est officielle ou dissidente, mais toujours dotée. Officielle, elle a les dîmes, le budget de l’état, la taxe d’église ; dissidente, elle a les sectes et ne s’en trouve pas plus mal. Il faut savoir que les Anglais ont gardé un goût très vif de la dispute théologique, de l’interprétation biblique. Cette passion a toujours tenu une grande place dans leur cœur et dans leur histoire. Elle fit la force de Cromwell. Rappelez-vous ces paroles de Bossuet : « Comme il vit que la passion de dogmatiser sans être repris par aucune autorité ecclésiastique ni séculière était le charme qui possédait les esprits… » Et pas plus tard qu’au commencement de ce siècle l’Irlande et l’Angleterre se querellaient horriblement pour la religion, juste à l’époque où nous entrions en jouissance d’un concordat qui éteignait tout dans un régime de paix, de tolérance, de pensions, de traitemens.

Telle est en Angleterre l’agitation de la société, mais en même temps la ressource des églises. Inspirez aux peuples croyance et respect, c’est le fonds qui manque le moins. Si riche à cet égard est l’église d’Angleterre qu’elle en est chrétienne et bienfaisante ; elle F est d’ailleurs par le titre même de son office, par la vertu de son institution. On ne prêche pas aux hommes toutes les vertus théologales sans quelque profit pour soi-même, sans être un jour ou l’autre la première dupe de son homélie. Tout comme les gouvernemens emploient quelque chose de leur puissance au maintien de

  1. Page 104 du document belge déjà cité.