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Examinés avec l’attention qu’appellent de semblables documens, jugés avec une impartiale justice, les publications successives de M. Fould et ses plans financiers ne répondent peut-être pas à toutes les espérances conçues. L’étendue et les causes du mal sont exposées avec Une précision et une vigueur qu’on n’aurait osé attendre ; mais les remèdes proposés seront probablement considérés comme insuffisans. Pour ma part, je pourrais me féliciter, si ce n’était là un triste sujet de satisfaction, de retrouver chez un témoin si bien informé une partie des réflexions que la Revue insérait il y a un an. Les chiffres seuls diffèrent, car je n’avais pas osé porter mes prévisions jusqu’au degré où M. Fould nous apprend que le mal était arrivé. Ceux qui se rappelleraient cette publication n’auront peut-être pas oublié non plus avec quelle vivacité elle fut attaquée, taxée d’exagération et signalée comme dictée par l’esprit de parti. Cependant l’accroissement de la dette publique, l’usage immodéré du crédit, l’élévation progressive des dépenses, l’abus des crédits supplémentaires et extraordinaires, l’énormité des découverts, ont inspiré à M. Fould des critiques plus vives que le furent les miennes. Il est vrai que je présentais comme le meilleur moyen de couper court aux abus le retour aux pratiques constitutionnelles et aux garanties contre le laisser-aller et l’empirisme, garanties qu’on cherchera vainement ailleurs que dans le contrôle efficace des représentans de la nation. M. Fould se place à un point de vue très différent. Il n’accorde qu’une importance secondaire à la spécialité des dépenses et au vote du budget par chapitres ; il ne consent à ce qu’on fasse un pas dans cette voie que « parce que l’empereur l’a promis ; » il ne voit pas « de très grands inconvéniens à cette modification, pourvu que les chapitres ne renferment que de grandes divisions. » M. Fould a demandé à d’autres moyens, qui seront examinés plus tard, le frein qu’il reconnaît indispensable à ce qu’il appelle le plus légitime des entraînemens, celui des dépenses utiles, oubliant un peu trop que toutes les dépenses paraissent aisément utiles à ceux qui les ordonnent.

J’ai hâte d’arriver aux modifications constitutionnelles qui ont fait l’objet du sénatus consulte du 31 décembre. Je m’abstiendrai donc de répondre aux argumens sur lesquels s’appuie le mémoire à l’empereur pour blâmer les anciennes formes dans lesquelles se réglaient les budgets des gouvernemens libres. Tout a été dit sur ce sujet, et ces sortes de discussions prennent trop aisément le caractère de récriminations pour que je veuille m’y laisser entraîner. Je dirai seulement, car je l’ai beaucoup entendu dire autour de moi, que l’aveu des mécomptes éprouvés depuis dix ans semblait motiver un jugement moins sévère sur les anciens erremens. Il n’est