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étaient du nombre. « Denzil Hollis, avec qui j’ai figuré dans un masque ![1] » disait Charles Hollis, cité devant le sanhédrin ministériel, exprima le désir qu’on le soumit à l’indulgence plutôt qu’à la puissance du roi, « Vous voulez dire à sa justice ? reprit le lord trésorier. — J’ai dit puissance, mylord, » repartit l’accusé. Eliot répondit avec beaucoup de calme et de tact. « qu’il rendrait compte de ce qui s’était passé à la chambre, s’il y était invité par la chambre, elle-même ; mais devant le conseil il ne prendrait pas, simple particulier, la peine de se remettre en mémoire ses paroles ou ses actes parlementaires, sa conduite d’homme public. » Le roi laissait entendre qu’il se contenterait d’une pétition dans laquelle ces hommes témoigneraient leurs regrets de l’avoir offensé. Il avait trop présumé de leurs craintes ; avoir d’eux ne voulut accepter le rôle « d’enfans ingrats et repentans » qu’il leur a ainsi destiné. Les juges, convoqués alors secrètement, eurent à décider si la peine capitale pouvait être demandée avec quelque chance de succès contre ces factieux obstinés. « Non, répondirent-ils, on devait au contraire accepter caution pour les prévenus, s’ils offraient garantie de bonne conduite. Sur ce dernier point, Eliot et ses coaccusés résistèrent encore. « Qu’appelez-vous bonne conduite ? Entendez-vous par là l’obéissance passive ? » demandait l’un d’eux. Tous refusèrent de comparaitre devant une juridiction autre que celle du parlement. Les juges, qui jusqu’alors avaient voulu rester dans la légalité, finirent par se lasser de ces résistances. Ils décrétèrent des amendes considérables, véritables prétextes à confiscations[2], et un emprisonnement limité seulement par « le bon plaisir de sa majesté. » Le bon plaisir de Charles Ier, laissa Eliot à la Tour de Londres jusqu’au 27 novembre 1632. Ce jour-là, le grand patriote, dont la santé déclinait depuis plus d’un an, rendit à Dieu son âme vaillante. Quelques semaines auparavant, les médecins déclarent qu’un changement d’air était indispensable à sa guérison, il avait, en termes respectueux, mais dignes, sollicité sa mise en liberté provisoire. Charles, après avoir lu la pétition, répondit : « Elle n’est point assez humble. », Eliot en rédigea une seconde que son fils devait remettre. Il y exprimait le regret d’avoir déplu à sa majesté. » Le lieutenant de la Tour intervint encore : lui seul devait se charger

  1. Et tu, Brute ! I wonder at it ! for we two were fellow revellers in a masque together.
  2. L’amende prononcée, contre Eliot était de 2,000 livres sterling, représentant au moins trois fois cette somme, valeur actuelle. Ordre fut donné aux magistrats des Cornouailles d’en poursuivre la rentrée par tous les moyens à leur disposition ; mais les rancunes de cour ne trouvèrent pas en eux de très zélés complices. Eliot avait pris soin de faire passer ses biens en d’autres mains que les siennes. Il y eut une « déclaration de nihil, » ou, comme on dit chez nous, procès-verbal de carence.