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une théorie complète sur la constitution physique et chimique du soleil, sur les phénomènes grandioses dont cet astre est le théâtre sur les taches que les astronomes y découvrent !

Les travaux récens de MM. Kirchhoff et Bunsen sont fondés sur l’analyse de la lumière solaire. Analyser, c’est décomposer ; mais on ne peut décomposer que ce qui n’est pas simple. La lumière solaire n’est pas en effet une lumière simple ; un rayon, si mince que vous le supposiez, traversant le trou d’une aiguille ou quelque orifice infiniment plus étroit, n’est pas homogène ; il est composé d’une infinité de rayons diversement colorés, mais qui, réunis en faisceau, composent ce que nous appelons la lumière blanche. Il n’y a qu’à jeter les yeux autour de soi pour comprendre que la lumière du soleil renferme toutes les couleurs : le monde varié qui nous entoure n’est pas un dessin, c’est un tableau. Si la lumière solaire était simple, tous les objets nous apparaîtraient avec de simples oppositions d’ombre et de clarté, comme des photographies : le plus grand charme de la nature serait détruit. La couleur n’appartient pas aux objets, car, le soleil disparu sous l’horizon, toutes les nuances s’évanouissent dans les mêmes ténèbres.

N’est-il pas un moyen de décomposer ce rayon de lumière que j’imaginais tout à l’heure traversant un trou d’aiguille, de manière à séparer les rayons colorés qui le composent ? Rien n’est plus facile : il suffit de le faire entrer dans un prisme de verre où les rayons divers se brisent inégalement. Ce phénomène de la réfraction, qui se produit toutes les fois que les rayons lumineux passent d’une substance dans une autre, explique tous les jeux de lumière qui se produisent dans l’eau, dans l’atmosphère, dans tous les milieux transparens. C’est à Newton qu’on en doit la première explication scientifique.

Qu’on se place dans une chambre tout à fait obscure, où le jour n’entre que par une fente très mince ouverte dans un volet, — qu’un prisme de verre se trouve sur le chemin de la nappe lumineuse qui pénètre par cette fente, — et qu’on dispose, à la distance de quelques pieds, une feuille de papier vis-à-vis du prisme. Les divers rayons qui composent la lumière blanche ne se réfractent pas de la même façon en passant de l’air dans le verre, puis en quittant le verre pour traverser l’air de nouveau : par conséquent, au lieu d’une ligne lumineuse blanche, on verra sur le papier un rectangle couvert de bandes diversement colorées. Newton y distinguait les sept couleurs principales suivantes : violet, indigo, bleu, vert, jaune, orangé, rouge, en réalité, les nuances passent des unes aux autres par une insensible et harmonieuse transition. On a donné à cet épanouissement d’un plan lumineux le nom de spectre solaire expression