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L’empereur refusa de recevoir une adresse qui méconnaissait ses droits souverains. Mises en demeure de la présenter sous une forme plus convenable, les deux chambres de Pesth déclarèrent n’avoir voulu attenter en rien à l’autorité royale, et, en maintenant toutes les questions de fond, elles se bornèrent à exprimer le vœu que le roi de Hongrie voulût bien rendre conforme aux anciens usages la prise de possession du pouvoir légitime qui lui avait été transmis. Un nouveau rescrit impérial répondit à l’adresse ainsi amendée.

L’empereur reconnaissait qu’il pouvait y avoir quelques difficultés à établir par tout l’empire un régime constitutionnel uniforme et à le rattacher en même temps aux institutions particulières à la Hongrie. C’était pour écarter ces difficultés qu’il avait convoqué la diète. Sans doute le diplôme du 20 octobre 1860, par lequel le régime constitutionnel est établi, ne permet pas que la diète hongroise délibère sur les intérêts communs à l’empire, sur le contingent militaire, sur les questions d’impôt ; mais cela ne détruit pas l’autonomie hongroise : elle sera fortifiée au contraire par l’entente des représentans hongrois avec les représentans librement élus des autres nationalités siégeant au conseil de l’empire. Le diplôme du 20 octobre a en outre plus étendu qu’il n’a restreint les pouvoirs de la diète hongroise, puisqu’il a confié à l’examen de cette assemblée toutes les contributions publiques, dont une faible partie était précédemment soumise à son contrôle. L’empereur, en donnant à la Hongrie une administration particulière, reconnaît ses droits à l’autonomie ; mais à côté de l’autonomie hongroise il y a l’unité, l’indivisibilité des couronnes que Charles VI voulut assurer par la pragmatique sanction. Cette unité, cette indivisibilité n’existent qu’avec le commandement des armées, la direction centrale des finances et la représentation unique de l’empire à l’étranger. Depuis longues années, on a toujours respecté ces conditions essentielles à l’indissolubilité de l’empire, et l’union de la Hongrie et de l’Autriche a été cimentée par des faits historiques et des liens bien autrement étroits que ce lien personnel dont parle l’adresse. Ce sont les lois de 1848 qui ont voulu pour la première fois établir l’union personnelle ; on sait où cette union a conduit. De ces mêmes lois, le diplôme du 20 octobre a sanctionné ce qui était acceptable, l’abrogation des privilèges de la noblesse, l’abolition des corvées, l’égalité civile, la liberté électorale ; mais elles renferment des prescriptions incompatibles avec la pragmatique sanction, funestes pour le repos de l’empire, mortelles à son intégrité : elles doivent donc être révisées. Pourquoi dès lors présenter comme une condition d’entente essentielle la reconnaissance entière de lois qu’il faut d’ores et déjà supprimer ou amender en partie ? — La Hongrie réclame l’annexion de la Transylvanie, consommée en 1848 sans le