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le saint-père. Ces préliminaires remplis, son vrai recours sera dans l’opinion publique et dans les événemens. Pour notre compte, nous persistons à croire que ce sont les événemens dont l’ancien royaume de Naples est ou sera le théâtre qui mèneront au dénoûment de la question romaine. Les troubles napolitains sont déjà loin d’avoir la gravité que leur attribue la presse hostile à la révolution italienne. On avait annoncé avec fracas le débarquement et les proclamations d’un partisan espagnol, Borgès, qui offrait un chef à l’insurrection. Borgès n’a pu réunir autour de lui qu’une petite bande. À peine entré en campagne, il a été battu. La plupart de ceux qui l’accompagnaient ont été faits prisonniers par les paysans. Il a pris la fuite, suivi de quelques hommes, et l’on croit qu’il ne tardera pas à être arrêté. L’Italie n’a rien à redouter de ces aventuriers étrangers, soi-disant conservateurs, qui ont appris des anarchistes d’une autre époque à faire de l’ordre avec du désordre, et qui ne réussiront point à donner une couleur chevaleresque à des expéditions de pillards. Ce n’est pas non plus au désavantage de l’Italie que peuvent tourner des actes aussi peu sensés que ceux que l’Espagne se permet envers elle. La cour d’Espagne a beau envoyer auprès de l’infortuné François II un ambassadeur : quel est le sens d’une si vaine démonstration ? Elle montre seulement que la reine d’Espagne a oublié qu’elle doit son trône au droit populaire, et que le maréchal O’Donnell ne se souvient plus d’être arrivé au pouvoir par une sédition militaire fomentée au nom de la liberté.

Le monde civilisé apprendra avec satisfaction l’intervention réparatrice que la France, l’Angleterre et l’Espagne vont enfin accomplir au Mexique. Les trois nations ont eu également à souffrir de l’anarchie mexicaine, et elles ont été également impuissantes à obtenir des divers gouvernemens de hasard qui s’emparent nominalement du Mexique les satisfactions qui leur étaient dues. Nous ne croyons pas que les arrangemens que les trois gouvernemens européens doivent prendre pour combiner cette expédition collective soient aussi avancés que l’a prétendu un journal anglais ; nous ne doutons point cependant que l’accord ne soit promptement conclu, et que l’Espagne, l’Angleterre et la France ne fassent bientôt elles-mêmes justice des insultes et des spoliations dont leurs nationaux ont été victimes au Mexique. On peut être sûr cette fois que la coopération des trois puissances sera efficace. Leur intention, paraît-il, serait d’occuper les principaux ports mexicains et d’y percevoir les revenus des douanes jusqu’à concurrence des sommes qui sont dues à leurs nationaux spoliés ou massacrés. Il y a quelques années, un ministre des finances, M. Lerdo, prit la peine de dresser un bilan des recettes et des dépenses du gouvernement mexicain. Il résultait du travail de ce studieux ministre que lorsque les choses allaient passablement au Mexique, c’est-à-dire lorsque le même gouvernement pouvait être maître à la fois et pendant quelque temps de la capitale et des ports, les revenus s’élevaient à environ 75 millions de francs et les dépenses