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LA
PHILOSOPHIE SPIRITUALISTE
DEPUIS DESCARTES

I. Essai de Philosophie religieuse, par M. Émile Saisset ; 1 vol. in-8o, 1859. — II. Œuvres de Spinoza, traduites par M. Émile Saisset, avec une introduction critique ; 3 vol. in-18, 1861.

« On ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve, » disait un philosophe antique, signalant ainsi le flux perpétuel des choses dans ce monde « où tout devient, ajoutait-il, où rien ne demeure. » Héraclite a raison : le flot pousse le flot, tout change, tout s’écoule, et l’atmosphère d’idées au sein de laquelle nous vivons aujourd’hui n’est pas celle que respiraient nos devanciers. Et pourtant à travers cette instabilité des phénomènes, au milieu de ce mouvement des générations, il y a des choses qui durent et qui reparaissent toujours. Cette matière, livrée à des transformations sans nombre dans l’immense laboratoire du cosmos, ne cesse pas d’être la même matière ; cet esprit de l’homme, qui déploie à travers les âges les pouvoirs que Dieu lui a confiés, est soumis de nos jours comme il y a deux mille ans à des lois invariables. Comment donc s’étonner que certaines époques, bien que séparées par une durée assez longue, offrent parfois de frappantes analogies ? On insiste plutôt aujourd’hui sur les différences des siècles, c’est-à-dire sur l’écoulement des flots. On veut que chaque période, chaque génération, chaque année même, j’allais dire chaque moment de la durée, ait son caractère distinct, et l’étude des choses passagères prétend se substituer à la contemplation des vérités éternelles. Puisque tout devient