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chent d’arriver au dénoûment avec la célérité que l’Italie désire. L’état incertain des provinces napolitaines a pu même un moment fournir un prétexte raisonnable aux temporisations du gouvernement français. Pouvions-nous livrer Rome à une nouvelle expérience, lorsque le plus élémentaire symptôme du succès de l’expérience tentée dans les provinces napolitaines manquait encore ? C’est à l’Italie, pouvions-nous dire de faire elle-même ses affaires ; elle nous forcera la main en rétablissant l’ordre dans l’ancien état napolitain, et en présentant à la papauté un projet de solution qui puisse être soumis à l’opinion du monde comme offrant de sérieuses garanties à l’indépendance spirituelle de l’église. Nous ne savons si c’est ainsi que l’on a raisonné à Paris : en tout cas, on en avait le droit. Cette politique expectante nous convenait d’autant mieux qu’elle était au fond la plus honorable et la plus sûre pour l’Italie. Le cabinet italien a compris spontanément que le chemin de Rome pour lui était à Naples ; il a compris qu’il lui importait de donner à l’Europe la démonstration que les désordres napolitains sont au fond une difficulté si peu sérieuse, que l’on a pu en venir à bout même en face de l’ancien roi de Naples, de sa famille et de ses amis réunis à Rome comme en un quartier-général qui touche à la frontière romaine. C’est en effet ce qui arrive. L’administration du général Cialdini a déjà presque dompté le brigandage. L’affaire de Naples dans sa difficulté la plus pressante, le désordre matériel, la dissolution sociale des campagnes, est à peu près terminée. Nous supposons en conséquence que le moment d’aborder pratiquement la question romaine est proche. Nous avons exposé comment cette question doit être résolue ; mais ce n’est pas tout pour le gouvernement italien que d’avoir le plan d’une solution : il faut qu’il ouvre sur cette base une négociation avec la cour romaine, il faut que les élémens du plan qu’il offrira à cette cour soient assez étudiés, assez complets, pour qu’ils puissent au besoin être portés au tribunal de l’opinion européenne. C’est en faisant dans ce sens une grande et solennelle démarche que le gouvernement italien, mettant la cour de Rome en demeure, fournira à notre gouvernement une occasion naturelle de se dégager de ce fardeau de l’occupation militaire que la France a trop longtemps porté.

Nous pouvons nous tromper, mais loin de penser, comme on l’a cru un instant d’après le langage des journaux officieux, qu’un nouveau bail ait été fait avec le gouvernement temporel du pape, nous estimons au contraire que nous approchons du moment décisif pour la solution de cette question. Si nous ne sommes point déçus dans nos prévisions, la question italienne aurait bientôt une conclusion. Les autres affaires qui tiennent en suspens d’autres parties de l’Europe sont loin d’en être là. On ne saurait dire encore si la résistance passive de la Pologne, si ce deuil touchant d’une nation unanime dans son invincible protestation produiront des conséquences politiques prochaines. On n’entrevoit pas non plus comment se pourra rétablir l’accord du peuple hongrois avec le gouvernement central