Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 35.djvu/507

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la révolution italienne par la suppression du gouvernement temporel, non pas seulement à l’avantage de l’Italie, mais au profit de l’église catholique et des progrès de la liberté dans le monde. Quand la solution que nous avons signalée, ou plutôt dont nous avons exposé la nécessité, s’accomplira-t-elle ? Nous répondrons, comme le bon moine du Mont-Cassin, que ce jour-là n’est point marqué sur notre almanach. Ce jour-là pourtant, nous en avons la certitude, arrivera. La France seule le retarde par cette occupation de Rome, dont il ne nous est pas plus possible qu’aux Italiens de prévoir la capricieuse durée ou les accidens hasardeux. Quoique nous n’ayons point donné aux Italiens la première place dans cette étude sur la question romaine, bien que l’intérêt qui nous a guidés avant tout soit celui de la consistance de la France libérale, notre dernier mot sera pour l’Italie. Qu’elle soit ferme et patiente dans le système de patriotisme et de libéralisme qu’elle suit dans cette question. En débutant dans les nouvelles destinées qui s’ouvrent à elle, elle a le singulier honneur d’attacher à son propre sort un intérêt qui dépasse ses propres limites, un intérêt vital de la civilisation moderne, celui qui exige la consommation finale de la séparation des pouvoirs spirituel et temporel. L’Italie ne défend donc pas seulement ici sa propre cause : qu’elle n’oublie pas qu’elle porte aussi le poids d’une cause qui est celle de l’humanité. C’est pourquoi nous lui recommandons de ne point s’exposer à compromettre son succès par des mouvemens d’impatience. Elle doit être certaine d’ailleurs d’être accompagnée et soutenue dans ses efforts et dans ses épreuves par l’opinion de tous ceux, dans le monde, qui ont l’intelligence de la liberté, qui ont le scrupule de la constance dans les opinions, et un jour aussi par les hommes vraiment religieux, qui lui devront l’émancipation de l’église.

E. Forcade.