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président, prêtre, juge ou magistrat, avait autour de lui des places pour ses assesseurs, ses accolytes, ses greffiers, et devant lui, à une certaine distance, l’autel nécessaire aux sacrifices ou aux libations, sans lesquels on n’entamait aucune affaire importante. Pour que de cette place on fût mieux vu et mieux entendu, on pouvait l’exhausser par une estrade de quelques degrés, et cette partie de l’édifice a été appelée techniquement la tribune, ou, parce qu’elle se terminait en coquille, l’abside. Le reste était le vaisseau de l’édifice, le vaisseau, c’est-à-dire la nef.

Il va sans dire que de très bonne heure le goût asiatique de la Grèce ne laissa pas dans sa nudité cette construction si simple. Ainsi, les Grecs ne voûtant pas leurs édifices, la charpente du toit, en s’agrandissant, eut besoin d’être mieux soutenue. Les pieds-droits furent nécessaires pour supporter des solives chargées de lourdes tuiles, et ce qui fut d’abord des poteaux devint bientôt des piliers en maçonnerie, qui à leur tour s’arrondirent et s’effilèrent en colonnes, reliées bientôt ensemble aux murs latéraux par des blocs ou des chaînes de pierres en architraves. Les anciens aimaient le grand air et craignaient le soleil : les toits purent s’élargir et déborder les murs sur lesquels ils reposaient; mais ils eurent alors besoin d’être soutenus à leurs extrémités, et ces soutiens ne mirent pas beaucoup de temps à devenir aussi des colonnes. Soit intérieurement, soit extérieurement, des files de colonnes parallèles aux murs vinrent donc orner le monument et ajoutèrent, sans l’alourdir, à sa solidité. Les deux choses même purent se faire à la fois ; les murs extérieurs furent intermédiaires entre deux rangées de colonnes, et celles de devant supportèrent un tympan triangulaire qui put devenir le plus bel ornement de la façade. Supposez ce péristyle exhaussé au-dessus du sol; qu’on descende par quelques marches dans une cour entourée d’un portique, vous aurez le dessin de tant de monumens que l’art et le luxe pouvaient, pai-mille détails, rendre magnifiques.

Mais concevons la basilique dans ce qu’elle a d’essentiel, prenons-la dans toute sa simplicité. Bien des villes romaines avaient la leur et l’employaient à des usages divers. Lors donc que la secte chrétienne, car il fallait bien commencer par être une secte, acquit assez d’importance, de hardiesse ou de liberté pour cesser de se réunir dans un étroit cénacle, il était naturel qu’elle s’assemblât dans la basilique. C’est dans la basilique peut-être que l’apôtre, arrivé de la veille, annonçait à une foule curieuse ou inattentive la parole nouvelle, si du moins l’indifférence de la multitude ou du magistrat lui permettait d’en user ainsi; mais là surtout où une société de chrétiens était constituée, ses réunions de piété, ses délibérations com-