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provinciales n’acceptaient plus qu’avec peine leur mandat du roi.

Des assemblées provinciales furent successivement instituées par arrêts du conseil dans les provinces suivantes : Trois-Évêchés, Soissonnais, Picardie, Auvergne, Ile-de-France, Lorraine et Bar, Alsace, Gascogne, Hainaut, Limousin, Poitou, Haute, Moyenne et Basse-Normandie, Anjou, Maine, Orléanais, Touraine, Lyonnais, Dauphiné, Saintonge[1]. Avec les assemblées déjà existantes, cette organisation embrassait la France entière, à l’exception des pays d’états que l’on respectait encore, et les chefs les plus illustres de la noblesse et du clergé avaient tenu à honneur de s’y associer. Les assemblées devaient toutes se réunir dans les chefs-lieux des généralités, excepté celle de l’Ile-de-France, qui était convoquée à Melun et non à Paris.

Le parlement de Paris enregistra sans difficulté les deux édits sur les assemblées provinciales et sur les corvées, il refusa pour les édits financiers, et cette résistance, que ne put vaincre un lit de justice, amena son exil à Troyes. Les autres cours souveraines du royaume prirent parti pour le parlement de Paris. Quand survinrent une à une les lettres patentes qui, en exécution de l’édit, établissaient des assemblées dans les diverses provinces, la plupart de ces cours protestèrent. De même que le parlement de Paris, pour justifier son opposition à la volonté royale, avait réclamé la réunion des états-généraux, les parlemens de province réclamèrent le rétablissement des anciens états provinciaux abolis par Richelieu. Il était un peu tard pour se souvenir de ces antiques libertés, éteintes depuis si longtemps, et s’il n’y avait eu réellement en jeu que des intérêts locaux, il eût été plus sage d’accepter ce que le roi donnait en échange de ce qu’on avait perdu ; mais au fond ce que les parlemens voulaient éviter, c’était la réunion des ordres et le vote par tête, c’est-à-dire la suppression implicite des privilèges. Le parlement de Bordeaux se distingua par sa violence ; il alla jusqu’à défendre à l’assemblée provinciale du Limousin de se réunir, et,

  1. Les noms des présidens nommés par le roi appartiennent à l’histoire ; les voici : Champagne, l’archevêque de Reims (M. de Talleyrand-Périgord) ; Trois-Évêchés, l’évêque de Metz (M. de Montmorency-Laval) ; Soissonnais, M. le comte d’Egmont ; Picardie, M. le duc d’Havre ; Auvergne, M. le vicomte de Beaune ; Ile-de-France, M. le duc du Châtelet ; Lorraine et Bar, l’évêque de Nancy (M. de La Fare) ; Alsace, le bailli de Flachslanden ; Gascogne, l’archevêque d’Auch (M. de La Tour-du-Pin-Montauban) ; Hainaut, M. le duc de Croï ; Limousin, M. le duc d’Ayen ; Poitou, l’évêque de Poitiers (M. de Sainte-Aulaire) ; Haute-Normandie, l’archevêque de Rouen (cardinal de La Rochefoucauld) ; Moyenne-Normandie, l’évêque de Lisieux (M. de La Ferronnays) ; Basse-Normandie, M. le duc de Coigny ; Anjou, M. le duc de Praslin ; Maine, M. le marquis de Juigné ; Orléanais, M. le duc de Luxembourg ; Touraine, l’archevêque de Tours (M. de Conzié), et plus tard le duc de Luynes ; Lyonnais, l’archevêque de Lyon (M. de Montazet) ; Dauphiné, l’archevêque de Vienne (M. de Pompignan) ; Saintonge, M. le duc de La Rochefoucauld.