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l’intention d’appliquer successivement à toutes les provinces les mêmes règles d’administration : il n’y avait par conséquent d’incertitude et d’hésitation que dans la forme. Ces mots ne signifiaient d’ailleurs rien de nouveau, plus d’un exemple récent ayant prouvé que le roi pouvait toujours revenir sur ce qu’il avait fait. Necker s’en était expliqué dans le passage suivant, qui termine le préambule de l’arrêt du conseil : « Sa majesté recommande surtout aux membres de la nouvelle assemblée le sort du peuple et les intérêts des contribuables les moins aisés ; c’est en revêtant cet esprit de tutelle et de bienfaisance qu’ils se montreront dignes de la confiance de sa majesté ; elle doit d’autant plus l’attendre de leur zèle qu’ils auront sans doute présent à l’esprit qu’indépendamment du bien qu’ils pourront faire à la province dont les intérêts leur sont particulièrement confiés, c’est du succès de leur administration que naîtront de nouveaux motifs d’étendre ces mêmes institutions, et qu’ils hâteront ainsi, par la sagesse de leur conduite, l’accomplissement des vues générales et bienfaisantes de sa majesté. Et si jamais, ce qu’elle ne veut pas présumer, les intérêts particuliers, la discorde ou l’indifférence venaient prendre la place de cette union qui peut seule effectuer le bien public, sa majesté, en détruisant son ouvrage et en renonçant à regret à ses espérances, ne pourrait jamais se repentir d’avoir fait, dans son amour pour ses peuples, l’essai d’une administration qui forme depuis si longtemps l’objet des vœux de ses provinces. »

On sait que le roi devait nommer les seize premiers membres, qui devaient désigner les trente-deux autres. Les seize membres nommés par le roi furent : pour le clergé, M. Phélypeaux de La Vrillière, archevêque de Bourges, M. de Véri, abbé de Saint-Satur, M. de Séguiran, abbé du Landais, et M. de Vélard, chanoine de Bourges ; pour la noblesse, le marquis de Gaucourt, le comte de Barbançon, le marquis de Lancosme et le comte Du Buat ; pour le tiers-état, M. Soumard de Crosses, maire de Bourges, et sept habitans notables des diverses parties de la province. Sorti de cette grande famille des Phélypeaux qui avait fourni tant de ministres depuis Henri IV et à qui appartenaient les Pontchartrain, les Maurepas, les La Vrillière, l’archevêque-président était le neveu du premier ministre Maurepas. Les archevêques étaient alors de véritables princes, non moins occupés des intérêts temporels de leurs diocèses que de leurs intérêts spirituels. M. de Phélypeaux dépensait avec munificence ses grands revenus ; on se souvient encore à-Bourges de son affabilité, de sa bonté, de son inépuisable bienfaisance. Il prit fort au sérieux la présidence de l’assemblée provinciale, et s’y dévoua tout entier.

Deux des membres du clergé avaient le titre d’abbés commendataires. On appelait ainsi les abbés nommés par le roi, et qui appartenaient