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de l’ouest. S’ils s’éloignent peu à leur arrivée sur le territoire français, cela n’a certes rien d’étonnant, puisque la frontière vient les couper si près de leur point de rencontre.

Dans des circonstances difficiles, le gouvernement aurait pu, voulant s’assurer une traversée, prendre des engagemens qui lui lieraient aujourd’hui les mains. Ces engagemens n’existent pas dans la loi générale des chemins de fer en Espagne. Existent-ils davantage dans les conditions spéciales imposées ? Les discussions ont-elles pu donner lieu à une méprise ? On n’a encore rien cité de concluant. Lorsque la commission des cortès présentait son rapport au sujet de la loi de concession du chemin de fer du nord en 1856, elle énumérait comme ligne d’intérêt général, devant communiquer avec la France, le chemin de fer du nord d’un côté, celui de Saragosse à Alsasua de l’autre, écartant la ligne directe des Alduides. Les cortès supprimèrent cette énumération, refusant ainsi d’engager l’avenir ; mais l’eussent-elles acceptée, le chemin devenait alors une question d’intérêt local, et la discussion restait libre. On voit bien qu’il y a eu des essais dans le sens restrictif, mais des essais timides et inavoués. Ainsi, le 11 juin 1856, le gouvernement était autorisé en ces termes à mettre en adjudication « le chemin de fer qui, partant de Saragosse, passant par Tudela, allait s’embrancher à Alsasua sur le nord. » Le 25 août 1857, une ordonnance royale disait : « Pour éviter que, dans aucun cas, deux lignes, surtout si elles sont subventionnées par l’état, aient le même parcours, sa majesté a daigné disposer que ledit chemin de fer (de Saragosse à Pampelune) aura son embranchement sur le chemin de fer du nord, entre Irurzun et Alsasua, au point que les études désigneront comme le plus avantageux, laissant la subvention proportionnée au parcours. » Il s’agit donc de deux lignes subventionnées, et le chemin des Alduides n’est pas dans ce cas. L’ordonnance ne faisait que reproduire, en les commentant, les termes de la loi.

Une préoccupation qui se distingue aisément dans tout ceci est celle de relier l’est à l’ouest par Alsasua. Cette préoccupation a fait naître un malentendu. La ligne d’Alsasua ne satisfait pas les intérêts qui réclament celle des Alduides ; ces lignes sont indispensables toutes les deux, l’une n’exclut pas l’autre. Rien ne justifierait légalement les prétentions d’une ligne unique au monopole des relations internationales, et ces prétentions sont même si peu acceptées que déjà il s’élève des réclamations demandant d’autres traversées des Pyrénées. Une discussion complète fera peut-être repousser définitivement le projet des Alduides ; mais le rejet sera certainement basé sur un autre argument que celui de l’illégalité.

Pourrait-on, d’un autre côté, voir dans la traversée des Pyrénées par les Alduides une atteinte à des droits ou à des intérêts créés ?