Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 33.djvu/698

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prises avec les difficultés des affaires s’aperçoit qu’il a été plus loin que la prudence ne le comportait, il s’ingénie à trouver dans le capital représenté par son intelligence et la bonne gestion de son industrie des ressources pour ainsi dire transitoires, qui l’aident à surmonter les obstacles. Ces ressources, il les rencontre dans la confiance qu’il inspire, dans le crédit qu’on lui accorde, c’est-à-dire dans le temps qu’il obtient pour atermoyer ses engagemens. Le pays doit agir de même ; mais à la différence des efforts privés qui ne peuvent être que des expédiens transitoires, il peut et doit saisir l’occasion qui lui est offerte de mettre ses institutions en harmonie avec les besoins permanens qui sont devenus l’essence même de son bien-être. Or, puisque les troubles apportés dans la répartition de notre richesse monétaire et la concurrence que se font entre eux les êtres collectifs pour l’accaparer au détriment des individus doivent être comptés parmi les grands maux de cette situation, puisque les engagemens pris par le public sont supérieurs aux ressources dont il dispose, il semble démontré que la conséquence à tirer de tous ces faits, c’est qu’il faut augmenter les signes de la circulation monétaire et fournir aux individus de nouvelles ressources pour produire. Sans doute ceux qui prétendent que la fortune de la France est inépuisable répondront à ceci que toute modification à ce qui existe est inutile, et que la circulation du signe monétaire, qui varie entre 700 et 800 millions, suffit parfaitement aux besoins de notre commerce et de notre industrie, aux transactions d’un capital de plus de 20 milliards de valeurs mobilières. Pourquoi alors ces brusques variations dans le taux de l’escompte de la Banque de France ? Ne sont-elles pas provoquées par l’inégale répartition des capitaux monnayés, nous répétons le mot, et par les restrictions apportées dans l’émission du signe monétaire appelé à les remplacer ? Et si on n’avait pas d’autant plus besoin de la monnaie et du billet de banque que la somme qu’ils représentent n’est pas en proportion des services qu’ils sont destinés à rendre, pourquoi une diminution d’une centaine de millions dans cette circulation paralyserait-elle toutes les affaires ? N’est-ce pas parce qu’elle est insuffisante ?

La centralisation dans une seule caisse des dépôts en numéraire empêche l’élévation du chiffre de ces dépôts, car il n’est pas permis de croire qu’il n’existe pas en France une quantité d’or ou d’argent supérieure à celle que possède habituellement la Banque. Personne ne contestera que notre pays possède toujours en numéraire une somme supérieure aux 4 ou 500 millions qui composent ordinairement l’encaisse de la Banque de France. Cependant cet encaisse de 4 ou 500 millions est le thermomètre du loyer de l’argent, et suivant qu’il augmente ou diminue, la marche régulière des affaires est troublée. Est-ce là une situation qui doive se perpétuer et devenir