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il s’agit d’accumuler, par le moyen de l’étable, une masse énorme de matières fertilisantes, afin de communiquer à la terre les forces productives qui lui font défaut. Aussi la vache à lait soumise à la stabulation permanente est-elle l’animal de prédilection. Dans l’argile du Hainaut, les élémens de la végétation ne manquant pas, pour développer la fécondité du sol il suffit à peu près de l’exposer à l’action bienfaisante de l’atmosphère par d’énergiques labours. Aussi est-ce ici le cheval qui dans la ferme remplit le rôle le plus important, L’inspection du bétail qui garnit les fermes ne laisse point de doute à ce sujet. Tandis qu’en Flandre on trouve de 8 à 10 bêtes à cornes pour une bête de trait, dans le Hainaut on compte ordinairement, sur une ferme de 100 hectares, 18 chevaux et une dizaine de poulains, de 10 à 12 vaches, et autant d’élèves, plus 200 moutons et des porcs pour la consommation domestique, c’est-à-dire que le nombre des chevaux égale, s’il ne surpasse, celui des bêtes à cornes. Les chiffres de la statistique confirment ces données. Ainsi dans l’arrondissement de Charleroi, où domine la culture hesbayenne, on trouvait en 1846 22 chevaux et 58 bêtes à cornes par 100 hectares de superficie[1], tandis que, dans l’arrondissement de Termonde (Flandre orientale), la race chevaline était représentée par le nombre 9, et la race bovine par le nombre 73.

La fertilité du sol, qui explique la prédominance des chevaux et la rareté relative des vaches, rend aussi le fermier moins diligent pour conserver les engrais, ou pour en augmenter la quantité et l’efficacité. Les fumiers réunis dans les cours présentent fréquemment un aspect pailleux qui indique une fermentation incomplète, et ils sont très inférieurs à ceux de la Campine et même de la Flandre. Quoiqu’on commence à apprécier généralement les bons effets des engrais liquides, bien des étables manquent encore de fosses à purin. Les cultivateurs n’achètent point d’engrais. L’emploi des vidanges est rare, celui du guano inconnu, ou considéré comme beaucoup trop coûteux, même par des fermiers riches, qui reculent devant une dépense que le dernier des journaliers flamands fait chaque année sans hésiter. Le seul amendement partout en usage est la chaux, qui est indispensable pour vivifier un sol compacte, et qu’on obtient à bas prix par suite de la proximité des terrains de formation calcaire. Au lieu d’être engraissés une ou deux fois par an, comme dans la zone sablonneuse, les champs ne sont fumés que tous les cinq ou six ans. La quantité d’engrais dont disposent

  1. Quoique dans les grandes exploitations le nombre des chevaux égale celui des botes à cornes, les chiffres de la statistique générale ne peuvent indiquer la même proportion, parce que beaucoup de petits cultivateurs travaillant leur terre sans chevaux tiennent néanmoins une vache.