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et officiers qui, depuis les troubles, faisaient volontairement le guet autour de White-Hall, où, comme je vous l’ai dit, on leur avait construit dans les cours une espèce de grand corps de garde. Il y avait aussi parmi eux, mais en fort petit nombre, de ces étudians en droit que sir William Killigrew était allé embaucher. Les hallebardiers et les pensionnaires de sa majesté étaient de la partie, comme bien vous pensez, et le tout, passablement en désordre, avait été assez longtemps, Dieu merci, à former le cortège. J’estime aussi qu’ils avaient attendu les renforts qu’ils espéraient des innes of court et le retour des messagers envoyés pour s’assurer si les trained bands s’étaient armées et si elles prenaient parti, ou en faveur de sa majesté, ou en faveur du parlement.

Pendant que ces choses se passaient, la chambre des communes avait tenu sa séance du matin, où M. Pym répondit, article par article, aux charges de trahison, et son éloquence souleva, m’a-t-on dit, des cris et des applaudissemens dans l’assemblée, surtout quand il déclara « que c’était trahison de lever une armée pour contraindre aucun parlement à décréter des lois autrement que par volonté libre et franc vote. » Mêmes clameurs et même approbation quand, après avoir, en apparence, terminé sa harangue, il vint près de la table du clerc et demanda au speaker, en toute déférence, « s’il était ou non constitutionnel que sa majesté apportât elle-même en cette chambre des articles de trahison, et si ce n’était point porter une atteinte au privilège que d’occuper les en tours et les portes de cette assemblée avec des gens armés, pendant que cesdits articles de trahison seraient lus à la chambre. » Vous voyez, madame, que M. Pym était assez bien averti, et qu’il prenait d’avance ses précautions. MM. Hollis, Haselrig et Strode furent entendus après lui, tous protestant à l’envi de leur innocence, et M. Hampden parla le dernier. Son discours roula principalement sur l’espèce d’obéissance qu’on doit au prince, limitée par la religion et les lois fondamentales du royaume. Cet homme, très doux à l’ordinaire, prit tout à coup ce jour-là un ton sévère qui étonna les membres royalistes et fut noté de tout le monde. On peut bien dire que l’accusation de trahison, souverainement injuste à leurs yeux, les a changés, lui et M. Pym, jusqu’alors simples défenseurs de la constitution, en ennemis résolus de la royauté. Ce n’est qu’à ce moment, je le crois, qu’ils ont tiré l’épée contre elle, et jeté bien loin le fourreau. Or ce ne sont pas là des ennemis méprisables : l’un, M. Pym, supérieur par son activité merveilleuse, sa connaissance des choses passées et des subtilités légales, la confiance qu’il inspire à raison des persécutions dont il fut l’objet (en 1614) et de son rôle important au fameux parlement de 1620 ; — l’autre, véritable modèle du gentilhomme anglais, calme, réservé, maître de lui, discret, et pourtant