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peut concevoir ; mais elle ne lui fit pas oublier le maintien de ses droits et le soin de sa dignité, même en ces momens de crise. Pour admettre le sieur Francis, on exigea qu’il déposât sa masse, conformément à l’étiquette. Ce fut donc dépouillé de ses insignes d’autorité qu’il parut à la barre, au milieu d’un profond silence, pour requérir, au nom du roi, que « M. le speaker lui délivrât cinq gentlemen, membres de la chambre des communes, lesquels, lui étant désignés, il avait ordre d’arrêter au nom de sa majesté comme prévenus de haute trahison. — Leurs noms, ajouta-t-il, sont : Denzil Hollis, sir Arthur Haslerig, John Pym, John Hampden et William Strode. »

Encore cette fois, nul débat ; un calme, un silence de menaçant augure. On s’agitait naguère dans l’attente du coup : le coup porté, la lutte engagée, plus de tumulte, plus de vaines paroles. Le sieur Francis reçoit l’ordre de se retirer hors des portes pour y attendre communication du bon plaisir de la chambre. On décide ensuite qu’un message sera porté au roi, non par son sergent d’armes, mais par quatre membres des communes, dont deux (mylord Falkland et sir John Colepeper), membres aussi du conseil privé de sa majesté, agiront néanmoins comme délégués de la chambre, et par obéissance au mandat qu’elle leur donne. C’était dire au roi que ses serviteurs, même les plus haut placés, ne seraient pas bien venus à décliner les ordres du parlement. Le message portait « que la chambre des communes prendrait en sérieuse considération la demande du monarque, et en toute obéissance, toute humilité, lui ferait faire réponse, promettant d’ailleurs d’avance que les membres accusés satisferaient à toute charge légale portée contre eux. » Chacun de ces cinq personnages, interpellé successivement par le speaker, reçut recommandation expresse d’assister régulièrement (de die in diem, comme ils disent) aux séances de la chambre, et ce jusqu’à nouvel ordre, leur présence devant être spécialement mentionnée et enregistrée dans les procès-verbaux. Des articles de trahison, il ne fut point question pour l’instant. On décida seulement que la chambre se réunirait le lendemain, sur les dix heures du matin, et se formerait en grand comité pour prendre en considération le message royal. Sans que cela fût dit, il était compris de tous qu’en cette séance du mardi serait entendue la réponse des cinq membres accusés. Le plus important restait à faire et fut accompli sans une minute de retard, qui était de convertir en ordre de la chambre la motion de M. Pym, déjà votée à l’ouverture de la séance, pour l’appel d’une garde prise dans les trained bands ou milices de la Cité. Deux des députés pour Londres (l’alderman Pennington et le capitaine Venn) furent chargés de porter cet ordre à Guild-Hall. Vous verrez plus loin ce qui advint de cette mesure décisive.

Pourtant, vers la fin de la journée, la conférence des deux chambres