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nord, de construction récente, sont généralement américaines : Jackson, Placerville, Marysville, Grass-Valley, Crescent-City. Sacramento, la plus grande ville de la Californie, la plus belle sans contredit, a tiré son nom du fleuve qui la baigne. Quelques villes portent celui de leur fondateur, comme Jamestown, Coulterville, ou d’hommes connus, comme Stockton[1]. D’autres localités, surtout dans les mines, attestent la nationalité de leurs premiers occupans. C’est French-Bar, Amencan-River, Chinese-Camp, Indiana-Diggings, Mormons’Settlement. Sonora rappelle le camp des Sonoriens, et la nationalité d’autres mineurs, premiers colons, chiliens, allemands, espagnols, se trouve également mentionnée dans des appellations caractéristiques. Ailleurs on peut remarquer des noms de pure fantaisie, comme Alpha, Omégay Poverty-Bar, Humbug-Hill, ou bien qui remettent en mémoire un fait fameux, comme Sébastopol. Beaucoup de localités enfin attestent l’exploitation de l’or et les rêves souvent satisfaits du mineur. C’est Ophir, dont les trésors ont sans doute égalé ceux des Phéniciens d’autrefois ; c’est Rich-Bar, Oroville, Quartzburgh, Gold-Hill, Eureka.

L’état de Californie est borné au nord par celui de l’Oregon et au sud par la péninsule californienne, connue aussi sous les noms de Basse ou Vieille-Californie, et qui appartient encore aux Mexicains. Il a pour limites à l’est la chaîne de la Sierra-Nevada et la rivière Colorado, à l’ouest les rives mêmes du Pacifique. L’étendue de terrain comprise dans ce périmètre est presque égale à la superficie de la France. Les différentes races qui habitent ce territoire sont encore les mêmes qu’aux premiers temps de l’exploitation des placers. Ce sont d’abord, en commençant par la race la plus nombreuse, les Américains, établis en maîtres sur le sol qu’ils ont conquis. Ils sont au nombre d’au moins 380,000, et ils ont apporté sur les bords du Pacifique leur fébrile activité de colons, leur indomptable énergie de pionniers ; Après eux viennent les naturels du pays, les Indiens, race apathique et paresseuse, dont le chiffre n’atteint plus que 60 ou 65,000 dans toute la Californie. Les Indiens ont d’ailleurs perdu sans retour, d’abord sous l’occupation mexicaine, et plus encore sous la dure domination des Yankees, le pays où, suivant leur pieuse expression, reposaient les os de leurs pères. Ensuite se montrent les Chinois, au nombre d’environ 40,000, travailleurs patiens, industrieux laveurs d’or, mais maltraités par les Américains, qui les oppriment, comme ils font des Indiens et des nègres, parce qu’ils ne sont pas de race blanche. Les Mexicains, soit indigènes, soit émigrés, y compris les Chiliens et les Péruviens, et quelques autres représentans des colonies hispano-américaines, forment aujourd’hui un contingent de près de,15,000 individus. Ils assistent avec indifférence au grand mouvement qui se poursuit autour d’eux. Les Français ; les Anglais, les Irlandais et les Canadiens, les

  1. On sait que le commodore de ce nom contribua en 1848 à la conquête de la Californie par les Américains.