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les droits particuliers des duchés, — ne s’accorde pas, il l’avoue ouvertement, avec l’interprétation qu’on entend aujourd’hui donner à ces mots… Il est évident qu’au lieu de s’attacher à terminer d’une manière équitable le différend dano-allemand, on veut au contraire tenir cette question toujours en suspens, au grand dommage de la monarchie danoise, particulièrement des duchés allemands, et pour réussir finalement à étendre l’action de la diète sur le duché danois de Slesvig. La chambre prussienne a fait de son mieux pour raviver tous les souvenirs de 1848. Elle a hautement proclamé la doctrine du slesvig-holsteinisme, que l’Europe a condamnée. Or le gouvernement du Danemark, s’il a dû supporter dans le Holstein une immixtion de l’Allemagne qui n’était pas même entièrement légale, proclame du moins que le Slesvig, pays exclusivement danois, n’appartient pas et n’a jamais appartenu à la confédération, et que le gouvernement danois ne se trouve pas même obligé envers l’Allemagne par aucun traité ni aucune convention pour ce qui est de l’organisation et de l’administration de ce pays… »


Par l’arrêté fédéral du 29 juillet 1852, véritable acte final terminant les troubles et la guerre suscités en 1848, les différends qui existaient jusqu’alors entre le Danemark et l’Allemagne avaient été déclarés définitivement vidés. De l’aveu même de la Prusse et de l’Autriche, l’abolition de l’ancienne union administrative et judiciaire du Slesvig et du Holstein avait été reconnue parfaitement légitime ; le Slesvig-holtenisme avait été réprouvé. Il est bien vrai que, pendant les négociations de la fin de 1851 et du commencement de 1852, le roi de Danemark avait formulé certaines déclarations ; mais examinons dans quelles circonstances, en quels termes et avec quelle portée. « Les droits souverains du roi de Danemark nous sont sacrés, disaient la Prusse et l’Autriche[1] ; mais selon notre conviction la plus profonde, il ne leur serait porté aucune atteinte, si la position de sa majesté l’amenait à donner des explications (erläuterungen) à ses confédérés. » Pour répondre à ces désirs des grandes puissances allemandes, le roi de Danemark avait bien voulu faire connaître ses pensées relativement à l’organisation future de la monarchie et particulièrement à la position que le Slesvig y occuperait. Il avait déclaré qu’il n’avait pas l’intention d’incorporer le Slesvig au royaume, et qu’il lui laisserait pour ses affaires particulières sa constitution et son administration provinciales. De telles déclarations avaient, à coup sûr, une grande signification pour tout le monde et surtout pour les sujets du roi ; mais elles ne donnaient pas le moindre titre à l’Allemagne pour s’immiscer dans les affaires du duché danois de Slesvig. Ni les cabinets de Vienne et de Berlin ni la diète n’avaient prétendu en 1851 et 1852 donner à ces actes le caractère de transactions synallagmatiques et obligatoires qu’ils

  1. Dépêche autrichienne du 26 décembre 1851.