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danois, le dimanche suivant en allemand. Les baptêmes, la communion, les mariages, sont célébrés dans la langue choisie par les intéressés. Dans les écoles, l’éducation est donnée en danois, mais quatre heures par semaine sont consacrées dans les classes supérieures à l’étude de l’allemand. Les deux langues sont aussi employées également pour les procès civils ou criminels et pour l’administration. Dans l’assemblée des états provinciaux, chaque député choisit la langue dont il entend faire usage ; le président et le commissaire royal sont seuls tenus de s’exprimer dans l’une et dans l’autre. Le gouvernement danois a modifié tout récemment dans le sens de la tolérance la disposition suivant laquelle la préparation à la confirmation et la confirmation elle-même devaient se faire en danois.

On voit que le germanisme n’a pas reculé jusqu’à la frontière méridionale du Slesvig, et qu’il est resté campé dans une partie de ce duché. On voit aussi que la résurrection nationale du Danemark n’a pas brisé absolument toutes les chaînes qui avaient été imposées au pays, et qu’elle n’a pas employé la violence pour revendiquer ses droits. Les droits, au point de vue historique, n’en étaient pas moins incontestables : le Slesvig avait jadis parlé danois jusqu’à l’Eyder, et si l’idiome Scandinave réclamait son ancien empire, le gouvernement danois était bien venu et très fondé à le propager et à le soutenir.

Quant aux duchés de Holstein et de Lauenbourg, allemands dès l’origine, ils relèvent aujourd’hui encore de la confédération germanique, dont le roi-duc de Danemark-Slesvig[1] est membre comme suzerain de ces deux duchés. Là ne s’est jamais montrée la lutte entre les deux nationalités, parce que jamais l’Eyder n’a cessé d’être la véritable limite des peuples Scandinaves, bien que, par une suite des anciennes relations féodales, les souverains du Danemark étendissent leur suzeraineté jusqu’à l’Elbe.

Voilà comment, le germanisme ayant aux derniers siècles envahi le Danemark, une réaction nationale l’ayant ensuite fait peu à peu reculer et rentrer à peu près dans ses justes limites, il s’agit maintenant de l’y contenir, et de défendre contre son goût perpétuel d’envahissemens un sol péniblement reconquis. Recherchons par quels moyens, par quels pièges cachés les nouvelles attaques s’organisent ;

  1. Il ne faudrait pas dire le roi de Danemark duc de Slesvig. Cette dernière qualité n’est, depuis l’incorporation de 1721, qu’un simple titre, à peu près comme si le roi d’Italie gardait le titre de roi de Piémont. Autre exemple qui fera bien comprendre cette distinction importante : le ministre de Slesvig s’appelle le ministre royal du duché de Slesvig) ce serait une expression presque insurrectionnelle de dire : le ministre ducal de Slesvig ou le ministre du duc de Slesvig. Ces détails peuvent aider à comprendre combien le Slesvig est intimement rattaché déjà au royaume de Danemark en droit et par la personne du souverain.