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accompagnées de force commentaires, des estampes antérieures de plusieurs années à celle de Finiguerra. Tout récemment, une Passion datée de 1446 et appartenant à M. Renouvier venait déposséder les nielles italiens de leur rang de doyens des monumens de la gravure sur métal, comme certaines pièces trouvées en Belgique et en Allemagne enlevaient au Saint Christophe de 1423 sa vieille réputation de spécimen absolument primitif de la gravure sur bois. Que penser de ces découvertes et des conséquences qu’elles peuvent avoir pour l’histoire de l’art ? Même en acceptant comme parfaitement concluans, au point de vue historique, les nouveaux témoignages que l’on invoque, en admettant de bonne grâce.que les dates signalées déterminent effectivement l’âge des estampes qui les portent, au lieu de reproduire simplement le millésime inscrit sur le tableau ou sur le dessin original, — on n’en serait pas moins autorisé à n’attacher qu’une importance secondaire aux documens exhumés par la science moderne et aux progrès qu’ils semblent favoriser. Ces progrès toutefois, il convient de les résumer, ne fût-ce que pour acquérir le droit de rester ensuite étranger au débat, et de revenir en sûreté de conscience aux talens manifestes, aux œuvres qui s’expliquent d’elles-mêmes, aux maîtres qu’on peut admirer sans le secours exprès de l’archéologie. Examinons donc à notre tour la question en litige, sauf à en simplifier les termes et à tirer de l’examen cette conclusion, que, si reculés que soient, dans l’ordre chronologique, les premiers essais de gravure, la gravure n’a véritablement commencé d’exister qu’à partir du moment où les preuves purement historiques font place à des preuves plus significatives, à l’expression sans équivoque du goût pittoresque et du talent.


I. — GRAVURE SUR BOIS.

Quelles qu’aient pu être entre les iconographes les divergences d’opinion sur les faits de détail, un fait général demeure pour tous à l’état de principe et de vérité incontestable : c’est que les procédés de la gravure sur bois étaient employés antérieurement à la pratique de la gravure sur métal. Quel intervalle toutefois sépare les deux découvertes ? À quelle époque se rattache l’invention de la gravure sur bois, ou si ce procédé, comme on l’a dit souvent, est d’origine asiatique, à quelle époque fut-il importé en Europe ? C’est ce qu’il serait au moins imprudent de prétendre déterminer. Les conjectures de toute sorte, les propositions contradictoires, ne manquent pas sur ce point ; mais les érudits ont eu beau rassembler des témoignages, interpréter des textes, tirer des inductions : le problème n’en est pas plus sûrement résolu pour cela, ou plutôt le nombre et