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à ceux qui peuplaient autrefois les États-Unis. Knox s’indigne de cette conclusion ; mais il ne nie aucun des faits sur lesquels s’appuie son prédécesseur. Il les précise au contraire, et signale en particulier la diminution du tissu graisseux et de tous les appareils glandulaires comme un fait général aux États-Unis[1]. M. Desor, dans une étude sur le climat de l’Amérique du Nord, a confirmé tous ces faits et signalé en outre l’allongement du cou comme devenu un trait caractéristique du type yankee. Quant au résultat général de ces altérations du type anglais, voici comment l’apprécie un homme d’intelligence et de savoir, qui a longtemps habité et étudié l’Amérique, et qui se trouve entièrement d’accord avec Smith[2] : «Un petit nombre d’années a suffi pour établir une distinction, déjà très marquée, entre les Américains modernes et les Anglais, dont ils descendent… Nous demanderons au voyageur attentif qui a parcouru les États-Unis de nous dire ce qu’il pense de certaines familles de New-York et de la Pensylvanie dont le sang est demeuré pur depuis un siècle ou deux, et des populations le plus anciennement établies dans le Kentucky et sur les bords du Mississipi. N’a-t-il pas observé, comme nous, une altération sensible non-seulement dans les traits, mais dans le caractère ? A part la civilisation européenne, qui les a suivis, on retrouve déjà chez les uns, avec l’angle facial, la fierté et l’esprit de ruse de l’Iroquois, chez les autres, avec l’extérieur, la rudesse, la franchise et l’indépendance de l’Illinois et du Cherokee. » Cette appréciation est acceptée aux États-Unis par les hommes de bonne foi, et M. l’abbé Brasseur nous citait à ce sujet le propos d’un homme éminent qui résumait devant lui une conversation sur ce sujet en disant : « Par les traits et par le caractère, nous sommes devenus des Hurons. »

Grâce à l’obligeance de Pruner-Bey, on peut ajouter l’appréciation raisonnée et scientifique des anatomistes à ces témoignages de voyageurs, de gens du monde éclairés. Ici je ne fais que transcrire[3]. « L’Anglo-Saxon-Américain présente dès la seconde génération des traits du type indien qui le rapprochent des Lenni-Lénapes, des Iroquois, des Cherokees. Plus tard le système glandulaire se restreint

  1. le docteur Knox est un des polygénistes les plus décidés qui aient écrit sur la question qui nous occupe. Il est du très petit nombre de ceux qui n’ont pas craint de suivre la doctrine de la pluralité des espèces jusque dans ses dernières conséquences ; aussi aurons-nous souvent occasion de le citer. Dans le cas présent, les modifications subies en Amérique par les races anglo-saxonne, française, etc., sont à ses yeux la preuve que ces races ne peuvent se propager et subsister dans le nouveau continent. Jusqu’ici les faits ne lui donnent guère raison.
  2. M. l’abbé Brasseur de Bourbourg, Histoire des Nations civilisées du Mexique et de l’Amérique centrale durant les siècles antérieurs à Christophe Colomb.
  3. Des médecins compatriotes de M. Pruner lui ont adressé les détails suivans, qu’il a bien voulu me communiquer.