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le 21 juillet 1856, et depuis il n’a pas été changé. Toutefois le principe de l’unité de tarif n’a cessé d’être opposé au principe des distances, et ceux qui en sont partisans ont remporté un demi-succès en obtenant qu’on l’appliquât à certaines catégories de dépêches. Cette transaction a été consacrée par la loi du 18 mai 1858, base du régime actuel des correspondances télégraphiques. C’est ce régime qu’il faut essayer maintenant de décrire en peu de mots.

En vertu de la loi du 18 mai 1856, les dépêches sont taxées différemment, suivant qu’elles circulent entre les bureaux du même département, de deux départemens limitrophes, ou qu’elles traversent plus de deux départemens. Dans la première classe, les dépêches simples (de un à quinze mots, plus cinq mots d’adresse) sont soumises à une taxe fixe de 1 franc, dans la deuxième à une taxe fixe de 1 franc 60 centimes ; dans la troisième, la taxe se calcule d’après la distance : elle se compose d’un droit fixe de 2 francs, augmenté de 10 centimes par myriamètre. Au-dessus de quinze mots, la taxe est, pour toutes les classes de dépêches, élevée d’un dixième par chaque série de cinq mots ou par fraction de série excédante.

Sous l’empire de ces tarifs, quelles sont les limites de prix d’une dépêche simple sur le territoire de la France ? La limite inférieure, on l’a vu, est de 1 franc dans l’intérieur d’un département ; de Brest à Toulon, la dépêche simple, qui a traversé diagonalement toute l’étendue de la France (101 myriamètres à vol d’oiseau), coûte 12 francs 10 centimes. De Dunkerque à Perpignan (93 myriam. à vol d’oiseau), le prix s’élèverait à 11 fr. 30 cent, ; de Bayonne à Wissembourg (96 myriam. à vol d’oiseau), à 11 fr. 60 cent. On peut donc considérer que le prix des dépêches simples est, pour la France, renfermé entre les limites de 1 à 12 francs environ. On a le droit de trouver ce dernier chiffre exorbitant ; mais dans la réalité il est assez rare qu’il soit appliqué, Paris peut être considéré comme le centre du mouvement télégraphique français ; les dépêches rayonnent de la circonférence au centre et du centre à la circonférence, et ne traversent qu’assez rarement l’étendue entière du territoire. La statistique permet d’apprécier, au point de vue des distances parcourues, quelles sont les dépêches les plus fréquentes et les plus productives. M. Pélicier, sous-chef de bureau au ministère de l’intérieur, a publié, dans les Annales télégraphiques la statistique de la télégraphie privée en France depuis l’origine jusqu’à la fin de 1858 ; pour l’année 1859, ce travail vient d’être achevé par M. de Thury. Il résulte de leurs recherches que le prix moyen des dépêches intérieures en France a été en 1858 de 5 fr. 12 cent, et, d’après les tableaux de M. de Thury, de 4 fr. 56 cent, en 1859[1].

  1. Sous l’empire des diverses lois qui ont réglé les tarifs jusqu’au 1er janvier 1858, M. Pélicier a calculé que le prix moyen d’une dépêche a été en 1851 de 8 fr. 51 cent., — en 1852 de 11 fr. 28 cent., — en 1853 de 10 fr. 64 cent., — en 1854 de 8 fr. 75 cent., en 1855 de 9 fr. 77 c, — en 1856 de 8 fr. 85 c, — en 1857 de 8 fr. 06 c. Ces chiffres indiquent suffisamment que la télégraphie, comme on devait s’y attendre, a servi surtout, dans les débuts, aux communications à longue distance. Pendant l’année 1858, 349,887 dépêches ont été échangées en France, et pour le quatrième trimestre de cette année seulement les tableaux statistiques indiquent pour la première fois quelle est la proportion des dépêches simples relativement à celles qui contiennent plus de mots. Sur 100 dépêches, on en comptait, durant cette période, 63,5 de 1 à 15 mots, 17 de 16 a 20 mots, 8,8 de 21 à 25 mots, 9,5 de 26 à 50 mots. Ces proportions ont à peine varié en 1859.