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quelque chose de permis. En effet, des discours imprimés ne deviennent-ils pas semblables à des articles de journaux ou à des brochures ? L’on y trouvera tantôt des informations, des autorités utiles à la conduite d’une controverse, tantôt des assertions peut-être mal fondées et contestables. Comment ne serait-il pas permis aux journaux, soit de se fortifier des unes, soit d’opposer aux autres des objections légitimes ? C’est une affaire de raison et de bonne foi. Peut-être certains journaux persisteront-ils, à l’endroit des discours des députés ou des sénateurs, dans cette réserve timide qui équivaut à une sorte de conspiration du silence ; ils allégueront le danger de l’incertitude où demeure encore la limite de leur droit. Nous ne saurions approuver une telle affectation de timidité. Dans le doute, la conduite généreuse pour la presse, c’est de ne point s’abstenir. Elle témoignera ainsi, dans la raison et la bonne foi de l’administration, d’une confiance qui deviendra communicative, et qui ne peut point n’être pas payée de retour. Lors même que la liberté-de discussion que saurait ainsi gagner et mériter la presse ne plairait pas toujours à l’administration, comment croirait-on qu’une discussion loyale ou une contradiction polie pût jamais amener pour riposte un acte de sévérité du pouvoir ?

Nous serons sans doute mieux éclairés encore et plus raffermis sur ces points importans par les prochaines discussions de l’adresse, par celle surtout de la chambre des députés. Nous sommes si près de l’ouverture de la session que nous n’insisterons pas sur les diverses questions intérieures qui doivent être la matière des débats de l’adresse, et que nous n’aurons pas l’impertinence et l’affectation de tracer le programme de ces intéressantes controverses parlementaires, attendues par le public avec curiosité.

Les questions extérieures, nous le constatons avec plaisir, prennent depuis quelques jours un aspect plus rassurant. Nous voulons parler du moins de celles qui inspiraient naguère de si vives inquiétudes, et qui menaçaient de faire naître au printemps une nouvelle guerre en Italie. Nous avons expliqué, il y a quinze jours, dans quels termes la lutte allait s’engager en Italie, et de quelle importance serait le résultat des élections générales qui allaient s’accomplir dans la péninsule. Le parti de l’action voulait la guerre immédiate avec l’Autriche, le tiers-parti, sans prendre une attitude si téméraire, empruntait des forces et en prêtait à son tour au parti de l’action. M. de Cavour, sans rien retrancher au programme de l’indépendance italienne, voulait contenir le mouvement pour fortifier l’Italie à l’intérieur, pour en concentrer les ressources et en fondre les populations dans le cadre des institutions parlementaires, pour conduire les résolutions de sa politique avec bon sens, en consultant la situation de l’Europe, en prenant enfin les précautions qui, au prix de la patience, assurent le succès. Les nouvelles déjà reçues des élections italiennes montrent que l’Italie n’a pas démenti le bon sens et la perspicacité dont elle a fourni à l’Europe des preuves si surprenantes depuis deux ans, et qu’elle donne raison à la po-