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la science, qui, pour leur trouver des noms, a dû appeler à son secours et les reines de l’histoire et les déesses de la mythologie, Celle-ci, c’est l’ondoyante Bérénice, dont la riche chevelure traîne et fait un flot dans les flots. Celle-là, c’est la petite Orithye, épouse d’Éole ; qui, au souffle de son époux, promène sa nacre blanche et pure, incertaine, à peine affermie par l’enchevêtrement délicat de ses cheveux, que souvent elle enlace par-dessous. Là-bas, Dionée la pleureuse semble une pleine coupe d’albâtre qui laisse, en filets cristallins, déborder de splendides larmes… » Il a réussi à saisir et à fixer le spectacle le plus ondoyant, le plus fugitif qui existe. Qui en effet, en contemplant les méduses, ne s’est pas cru le jouet d’une illusion ? On dirait des rêves qui ont pris corps, et ici la comparaison n’est pas une simple figure, elle exprime une réalité. Si les rêves ont par hasard une existence, cette existence n’est pas plus fluide que celle des belles méduses. Les rêves existent dans l’élement du sommeil, comme les méduses dans l’élément de la mer, et se dissipent au réveil sans laisser de traces, comme les. méduses se fondent en un instant au sortir de l’eau. Plus loin, il trouve, pour célébrer les amours et l’éclat sympathique des perles, des splendeurs de Mille et Une Nuits et des concetti tout brillans des feux de l’hyperbole orientale. « Comme les palais d’Orient ne montrent au dehors que de tristes murs et dissimulent leurs merveilles, ici le dehors est rude et l’intérieur éblouit. L’hymen s’y fait aux lueurs d’une petite mer de nacre, qui, multipliant ses miroirs, donne à la maison, même close, l’enchantement d’un crépuscule féerique et mystérieux. » Il explique le langage symbolique des perlés en termes d’une subtilité charmante qui ferait honneur à un poète persan habile dans l’art des rapprochemens inattendus et des analogies secrètes. « En réalité, l’éclair du diamant fait tort à l’éclair de l’amour. Un collier, deux bracelets de perles, c’est l’harmonie d’une femme, l’ornement vraiment féminin, qui, au lieu d’amour, émeut, attendrit l’attendrissement. Cela dit : Aimons ! point de bruit ! » C’est précieux, me direz-vous peut-être, mais cela est en même temps charmant et exact. Il est certain que les parures de perles ont une douceur intime et sympathique que n’a pas le dur et froid diamant. Une parure de perles s’harmonise avec la personne vivante ; une parure de diamant semble plutôt posséder celle qui la porte qu’en être possédée. Si ces lignes se trouvaient dans un poète persan, il se trouverait quelque savant traducteur pour les interpréter et en expliquer la vérité. Pour nous, nous ne les trouvons pas moins aimables parce qu’elles sont écrites par un de nos compatriotes, au lieu d’être traduites d’Hafiz et de Saadi.

Les tons sont aussi variés que les êtres que l’auteur est obligé tour